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Page:Renard Oeuvres completes 1 Bernouard.djvu/43

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XXXI
PRÉFACE.


même, les trois dominantes de Renard, originaire de Chitry, sont la sympathie pour les pauvres, la foi en la République (dès 1870 Tillier eût été républicain), et le mépris pour le prêtre qui reste trop en-deçà de l’idéal qu’il propose à autrui. Mais ne le prenons pas pour un fanatique intégral. Sa pitié, clairvoyante, note, des malheureux, les faiblesses et les tares. Il ne pense pas que, de la République, tout soit parfait, et il sait qu’un des curés de Chitry, qui tâcha d’être un saint, est mort à la peine dans le dénuement le plus affreux.

Mais il semble que ce soit surtout de son père, dans l’absolu, qu’il ait hérité ce sentiment de la Justice dont il ne se défit pas. À ceux qui le lui reprochèrent après sa mort, il avait répondu par anticipation : « Depuis quelque, temps, certains hommes de lettres sont d’une vertu farouche en politique. Il ne paraît pas encore qu’ils souffrent de leurs mœurs littéraires. La vie privée d’un autre ne nous regarde pas ! Pourquoi ? Ce monsieur nous fait de la morale : voyons d’abord si ce n’est pas une fripouille. »

Il pensait — et c’est d’une si criante évidence que je m’excuse d’y insister, — que, tant que les écrivains n’auront pas cessé d’être des hommes, ils n’auront absolument aucun droit à in vétiver contre autrui. À juste titre il avait en horreur ces hérauts du catholicisme qui recommandent à autrui des dogmes dont eux-mêmes font fi, des vertus dont ils font litière, des observances dont ils se libèrent. Il connaissait leurs mœurs. Pour son bonheur, il ignora la race exécrable de ces mystiques qui ne rougissent pas de ne se point guérir des multiples tares qu’ils s’effraient de découvrir en autrui, tas de Pharisiens qu’il faudrait chasser du Temple où ils n’apportent que le suint de leur orgueil. Et tout cela qui, à tout prendre, est normal chez quiconque ne s’établit pas directeur de cons-