de l’école " et le " potache " sont touchés beaucoup moins par le récit que par le fait,
et par la forme que par le fond ; et la
plupart des hommes, sur ce point comme sur
tant d’autres, restent petits gars de l'école
et potaches.
J'ajouterai qu’ils jugent de l’excellence de l’écrivain d’après l’importance — cependant très relative, — du sujet. Or, jamais Renard n’a traité de sujets réputés grands. Ses
pages les plus parfaites, parce que dépouillées de toute littérature à effet, ne provoquent point, chez ses lecteurs inavertis, ce frémissement que déclenche en eux la
description par exemple, de belliqueux et répugnants massacres à quoi s’attache la
puérile idée de gloire. Ou bien,
s’ils comprennent ce ne sera qu’à rebours :
ils riront de Poil de Carotte. Ecrivain d’anthologie, Renard ne peut l’être
vraiment que pour ceux qui sont familiarisés
de longue date avec son œuvre aussi bien qu’avec ses intentions.
Classique, il ne l’est point davantage au sens vulgarisé du mot. Classique, je crois bien qu’il ne le sera jamais pour ceux des professeurs qui gardent l’esprit de leur caste, et quantité d’hommes sont professeurs virtuels, comme ils restent petits gars de l’école et potaches. Du point de vue des professeurs authentiques, il faut reconnaître qu’ils n’ont pas tout à fait tort ; je ne le reconnais d’ailleurs, que pour autant qu’ils seraient capables de reconnaître eux-mêmes que le classicisme n’a pas tout dit. Les observations de Renard n’ont ni la généralité, ni la profondeur qu’on s’accorde à trouver chez les grands psychologues des siècles précédents. Classique, il ne peut l’être qu’à sa manière, qui lui appartient en toute propriété, puisqu’il l’a créée quasi de toutes pièces. Plutôt que de reprendre à son compte des notations tombées dans le domaine du lieu commun, il a fait table rase. Il aurait pu dire, modifiant le mot de Descartes : " Je vois de mes yeux : donc je suis ". Ainsi a-t-il pu voir ce qu y on n’avait pas vu