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Page:Renee-dunan-entre-deux-caresses-1927.djvu/42

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ENTRE DEUX CARESSES

avec des pointages à l’encre rouge. Enfin un seul fauteuil, vissé, dans l’axe d’une ligne rouge tracée sur le parquet.

Jeanne, d’un regard, détailla ce mobilier qui n’avait rien d’ensorcelant. Elle s’assit enfin. Un malaise lui fut perceptible au sein de ses fibres les plus secrètes. Elle se releva et vint, par la fenêtre, regarder la rue étroite et les maisons d’en face. Du temps passa. Soudain elle crut deviner une présence à son côté. Cela était si aigu que le cœur lui en sauta. Une horreur incompréhensible se dégageait du silence.

Une porte s’ouvrit. Un homme entra. Il saluait avec toute la grave humilité d’un oriental, puis il dit d’une voix sans timbre :

— Madame, veuillez attendre, je vous en prie, quelques minutes. Madame Raia sera à vous dans peu d’instants.

Jeanne dévisagea l’inconnu avec curiosité. Il se tenait, les paupières baissées, très droit, avec sur les lèvres une expression de douleur.

— Voulez-vous, Madame, me dire, s’il vous agrée, le quantième de votre naissance ?

Jeanne dit, avec une légère ironie :

— Neuf avril.

L’homme vint à la table et mania les cercles de bois minces qui se superposaient en un plan arrondi à rebords de cuivre.

Il disposa tout selon un ordre à son gré.

— L’heure, Madame ?

— Une heure du matin.