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Page:Renel - La Race inconnue, 1910.djvu/234

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noirs. Il attendait avec patience que le boutou apportât une tranche du bœuf, apprêtée par son cuisinier, lorsque l’interprète parut à l’entrée de la tente et annonça d’un ton de triomphe que le vent avait tourné. En effet le souffle desséchant du sud-est s’était changé en une brise du nord, presque fraîche. Et voici que la brise devenait un vent violent, précurseur d’orage. Les Androuy ravis couraient çà et là, frappant les sagaies sur les boucliers de cuir, soufflant dans les andzoumbouna et regardant s’accomplir l’œuvre du Faiseur-de-pluie. Maintenant de petits nuages traînaient dans le ciel, s’effilochaient en charpie floconneuse, puis l’horizon tout à coup s’assombrit, devint noir. Il n’y eut pas de coucher de soleil, mais une marée de nuages monta, envahit l’ouest, puis le nord ; le tonnerre se mit à gronder sans interruption ; bientôt la pluie tomba en larges ondées. Toute la nuit l’eau ruissela, des rafales secouaient la tente, arrachaient les piquets ; pendant que battaient les pans de toile soulevés, l’averse trempait le lit de M. l’Administrateur. Celui-ci ne savait s’il devait se désoler ou se réjouir. Il penchait plutôt du côté de la joie. Qu’importaient quelques heures pénibles, au prix du miracle accompli ?

Le lendemain, au point du jour, lorsqu’il sortit de la tente, l’Ounikely roulait à pleins bords des flots boueux couverts d’écume ; la population androuy