Aller au contenu

Page:Renel - La fille de l'Île-Rouge, roman d'amours malgaches, 1924.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
98
LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

l’oubli, et de ces nobles, rien ne restait que ces sépulcres à demi effondrés, avec leurs Maisons-Froides disjointes et vermoulues, et les morts délaissés, pour qui aucuns descendants n’accomplissaient plus les rites.

Un malgache de teint clair, à figure ronde et pommettes saillantes, les yeux un peu bridés, comme ceux d’un Japonais, debout au pied d’un des tombeaux, regardait Claude.

— Tu connais celui-là ?

— C’est Raoubène.

— Et qu’est-ce que Raoubène ?

— Un Andriane. Il habite dans le Rouve la grande maison neuve en briques. Ses ancêtres sont dans l’un des tombeaux que tu vois.

— Il connaît sans doute leur histoire. Crois-tu qu’il répondrait à mes questions ?

— Je ne sais pas.

Ils s’approchèrent de l’Andriane silencieux, drapé dans son lamba blanc. Sans bouger, ni quitter son attitude digne et réservée, il dit à l’Européen, en français.

— Bonjour, monsieur.

Claude remarqua que Razane le saluait avec la formule réservée aux nobles et qu’il lui répondait avec une nuance très nette de condescendance. Raoubène, interrogé sur l’allée funéraire, donna des détails. Les tombeaux étaient abandonnés, sauf deux. Le plus ancien datait de 170 ans environ ; il était revêtu d’un mur de pierres sèches et de dalles plates alternées ; la Maison-Froide, en bois, mesurait trois mètres au pignon et aurait rappelé les cases anciennes,