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Page:Renel - La fille de l'Île-Rouge, roman d'amours malgaches, 1924.djvu/171

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LA FILLE DE L’ÎLE ROUGE

il vint d’un pas tranquille, sans se presser, retira poliment son chapeau et dit intentionnellement, sans regarder Razane :

— Bonjour, vazâha !

Il portait un pantalon blanc, et, par-dessus, tombant jusqu’aux genoux, une chemise en zéphyr rose passablement maculée de taches de graisse ou de charbon ; il avait chaussé, par orgueil, des espadrilles que d’ordinaire il mettait seulement le dimanche.

— Tu te trouvais donc mal à la maison, dit Claude. Pourquoi nous quittes-tu ?

L’homme roulait son chapeau entre ses mains, sans répondre.

— T’en vas-tu pour gagner davantage ? Je t’aurais augmenté de cinq francs, si tu me l’avais demandé.

Il ne disait toujours rien, attendait patiemment qu’il plût au vazâha de le laisser partir. L’Européen s’agaçait de cette obstination silencieuse ; il la connaissait, la rencontrait chez ses domestiques, chez Razane, chez ses ouvriers, s’y heurtait presque toujours vainement. Cette fois encore il s’entêta pour en avoir raison, multiplia les questions, fit tant et si bien que l’autre se décida et dit tout d’un trait :

— Dindon jeudi vendu par parents Madame plus cher qu’au bazar, vieux dindon dur comme pintade fatiguée ; toi engueuler moi. Ananas, mangues, navets, choses beaucoup vendues comme ça : toi engueuler moi. Quand Malgaches gagner petit sur les choses, ça bon, vazâha pas voir ; mais quand vouloir gagner