Page:Renouvier - Critique de la doctrine de Kant, 1906.djvu/147

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L’IDÉAL DU SOUVERAIN BIEN 13") l'idée morale, une priorité logique sur le progrès de l'idée de Dieu :« Un concept de l’Etre divin a été éla- boré, que nous tenons maintenant pour correct, non parce que la raison spéculative nous a convaincus de son exactitude, mais parce qu’il s’accorde avec les prin- cipes moraux de la raison... A quel point que nous conduise légitimement la Raison pratique nous ne devons pas regarder nos actions comme obligatoires parce qu’elles sont des commandements de Dieu, mais nous devons les regarder comme des commandements divins, parce que nous sentons une obligation intérieure de les suivre. » On peut consentir à ces thèses remarquables du grand théoricien de la morale pure, de la morale comme réelfondement de toute croyance intellectuelle transcen- dante, et soutenir cependant, contre son opinion, que les vérités transcendantes, une fois acquises, agrandies par la spéculation et séparées aussi des vices dont la spéculation elle-même en a chargé les concepts, en un mot, épurées et fortifiées par l’application des normes logiques de l’entendement, atteignent une valeur théo- rétique propre, et une valeur qu’il est d’autant plus légi- time et même nécessaire de leur reconnaître, si on les croit comme le faisait Kant utiles au soutien de la vie morale, que les vérités transcendantes ne se peuvent atteindre par la voie logique pure. Mais Kant, en terminant ce chapitre, se prononce définitivement contre la réalité matérielle des concepts divins, et, les plaçant, quels qu’ils soient, sur le même rang, les taxe de fanatisme : « La théolog-ie morale n’est que d’un usage immanent, elle nous enseigne à remplir notre destination, dans le monde, en nous adaptant au système général des fins, sans abandonner fanatique- ment, et même criminellement, la Raison notre guide et nos lois morales dans la conduite de notre vie, pour la