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— Le brûleur de femmes !

À cette déclaration faite par le Thug d’une voix ferme et avec un geste d’une sauvage énergie, un frémissement parcourut l’auditoire. Des murmures de colère et d’horreur s’élevèrent de tous les points de la salle. Quelques femmes furent saisies d’une terreur qui se traduisit par des crises nerveuses.

Ce fut pendant quelques instants un désordre complet.

Mais Hyder-Ali contemplait la foule le sourire aux lèvres, comme un conteur tout fier de l’effet qu’il a produit et certain de ne pas laisser languir l’intérêt de son récit.

Le président. — Avant de pousser plus loin ces interrogatoires qui, selon le caractère des accusés, vont donner lieu à des révélations de toute nature, où malheureusement l’horrible, je le crains, tiendra une trop grande place, je crois nécessaire de recommander de nouveau à l’auditoire de garder le plus profond silence. Au fur et à mesure que nous allons avancer dans ces débats, le calme et l’attention deviendront le plus en plus indispensables.

« Il n’a pas dépendu de moi que les femmes ne fussent pas admises dans cette enceinte ; mais je déclare que si elles donnent encore lieu à des scènes semblables à celle qui vient de se produire, l’entrée de la salle d’audience leur sera désormais rigoureusement interdite.


Un murmure d’approbation accueillit respectueusement ces dernières paroles du magistrat, et dès ce moment l’interrogatoire d’Hyder-Ali put être poursuivi au milieu du plus profond silence.

Le président, à l’accusé. — Depuis combien de temps faites-vous partie des bandes de Thugs ?

Hyder-Ali. — Depuis mon enfance. Ma mère était la femme d’un Étrangleur. On se servait de moi, lorsque j’étais tout jeune, pour attirer loin du village les autres enfants sous le prétexte de jouer avec eux.

Le président. — Que devenaient ces malheureux ?

Hyder-Ali. — Ou on les sacrifiait à Kâly, ou on les élevait pour faire des disciples, selon des augures.

Le président. — Et, jeune comme vous l’étiez alors, votre cœur ne vous disait pas que vous commettiez un crime en attirant dans un piège des enfants de votre âge pour les mener à la mort ou à l’infamie ?

Hyder-Ali. — Je savais déjà que j’obéissais aux ordres de la déesse.

Le président. — Quel était le but de votre réunion dans la forêt de Rani ? Qui l’avait provoquée ?

Hyder-Ali. — Moi-même ; j’avais jugé cette assemblée nécessaire, car