Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/263

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crises dont souffre parfois Mlle de Tiessant ; néanmoins comme ces accidents sont souvent les prodromes d’affections de la poitrine ou du cœur, je voudrais qu’elle évitât les grandes fatigues et les émotions trop vives, lors même qu’il ne s’agirait que de phénomènes purement nerveux, ce qui est fort possible ! C’est déjà bien assez de son théâtre !

— Comment lui dire cela ?

— Ah ! je sais bien que ce n’est pas facile ! Tâche de lui faire comprendre qu’un artiste a besoin de ménager ses nerfs pour rester maître de lui-même à la scène, que la surexcitation ne permet pas au comédien d’être naturel, ce qui est une des qualités essentielles du talent, que le grand acteur est celui qui fait pleurer sans pleurer lui-même. Sermonne-la enfin au nom de son satané métier, puisqu’elle en raffole !

— Mais dois-je la laisser partir ?

— Quelle raison lui donnerais-tu pour la garder près de toi ? Tu ne lui dirais pas qu’elle est malade ? Qu’en ferions-nous avec son imagination ? De plus, je te le répète, je puis me tromper, et peut-être qu’un changement de climat suffira pour que les accidents en question ne reviennent pas. Dans ma conviction, elle n’a besoin que d’une vie plus tranquille, mieux équilibrée. Empêche-la de nager pendant des heures entières, d’abord parce que, si elle était prise de suffocation au large, elle pourrait fort bien se noyer ; ensuite parce que le séjour trop prolongé dans l’eau salée ne lui vaut rien. Il en fait un paquet de nerfs