Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/296

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sur tous les visages, on criait : « Bon courage, à l’année prochaine, à bientôt ! » Les fleurs tombaient en avalanche sur la scène ; bon nombre de femmes y lançaient, en pleurant, les bouquets de leur corsage. Jamais artiste n’avait reçu de plus sympathiques adieux !

De quelque énergie qu’elle se fût armée, la pauvre comédienne ne put résister à l’émotion ; elle ferma les yeux ; on dut l’emporter avant même que le rideau fût complètement baissé, et dix minutes plus tard, Ronçay et Jeanne l’étendaient sur son lit, à demi morte, mais la physionomie rayonnante d’orgueil.

La nuit qui suivit cette soirée fut mauvaise et, le lendemain, le docteur Tavini n’était pas sans inquiétude. Cependant, vers le milieu du jour, Mlle de Tiessant devint un peu plus calme, et on put espérer qu’elle sortirait saine et sauve de cette crise.

Toutefois cet accès ne permettait pas de songer à un départ immédiat, et le sculpteur se résigna à attendre toute une semaine avant de quitter Rome, si impatient qu’il fût, non seulement de confier sa chère enfant à des médecins parisiens qui la sauveraient, il en voulait avoir la conviction, mais encore de l’arracher à l’accablement étrange qui parfois s’emparait d’elle.

En effet, lorsqu’elle était seule, Éva demeurait immobile, muette, les yeux fixés sur un beau Christ d’ivoire, véritable œuvre d’art qu’elle avait achetée à Florence, et sa femme de chambre la surprenait