Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/87

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les plaisirs grossiers répugnent, et en poète chercheur d’idéal, ne confondant pas les satisfactions des sens avec l’amour.

Il ne fermait pas rigoureusement la porte de son atelier aux belles filles que ses confrères traînaient à leur suite, et s’il avait eu même, çà et là, quelques liaisons, mais sans lendemain, il s’était toujours garé de ces chaînes qui rivent à l’irrégularité et parfois à l’impuissance des hommes de talent.

Indulgent pour autrui, d’un abord facile, la main et la bourse toujours ouvertes, le créole de Bourbon n’était sévère que dans le choix de ses intimes. Aussi n’en avait-il qu’un petit nombre, trois ou quatre au plus.

Celui qu’il préférait à tous était le docteur Bernel, qui l’avait soigné dans cette maladie grave au cours de laquelle Mme  Bertin avait joué son rôle de voisine bienfaisante. Cependant il existait entre les deux jeunes hommes les contrastes les plus frappants ; mais les amitiés sont un peu comme ces jeux de patience où il faut que les angles sortants trouvent exactement place dans les angles rentrants pour former un tout complet.

Raymond Bernel, ancien interne des hôpitaux, était un praticien habile, fort soucieux de ses devoirs professionnels, mais sceptique, voltairien et même quelque peu entaché de matérialisme, ce qui ne l’empêchait pas de combattre à outrance la laïcisation des hospices, car, disait-il, aucune infirmière laïque ne remplacera jamais la sœur de charité, dont le dé-