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INTRODUCTION



La plupart des hommes n’ont qu’un seul genre de folie, Restif de la Bretonne en avait deux. Il était graphomane et erotomane.

Qu’il fut graphomane, ses deux cents volumes le prouvent, et l’importance qu’il leur accordait. À la fin du quatrième tome de la Découverte Australe[1], dans une note un peu amère, il avoue que ses livres, et surtout ses premiers livres, lui rapportaient de très médiocres bénéfices. Après avoir débuté en 1767, il n’était arrivé à la réputation que depuis la publication du Paysan perverti, en 1775, et dans les dix années qui suivirent il gagna une soixantaine de mille francs[2], que les assignats de la Révolution lui firent perdre presque entièrement. En réalité, que ses romans lui fussent bien ou mal payés, il écrivait pour le plaisir d’écrire, pour raconter sa vie et étaler sa personnalité. Voilà précisément ce qui caractérise la graphomanie, ou, pour me servir d’une de ses expressions, l’auteuromanie.

L’érotomanie de Restif ne fait point de doute. Elle allait jusqu’au fétichisme[3], très visible dans toute l’œuvre de ce fou de

  1. La Découverte Australe par un homme volant, ou le Dédale français : nouvelle philosophique, suivie de la lettre d’un singe… Imprimé à Leipsick : et se trouve à Paris. S. D. (1781), 4 vol. in-12. C’est un des livres les plus rares de Restif de la Bretonne.
  2. Cinquante-six mille francs, d’après Cubières-Palmezeaux dans la biographie placée en tête de la Bibliographie et Iconographie de tous les ouvrages de Restif de la Bretonne, par P.-L. Jacob, Paris, 1875.
  3. Voir dans la Chronique médicale un intéressant article du Dr Louis, Un Romancier fétichiste : Restif de la Bretonne.