Page:Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/111

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ciété. Le vin n’y entrait pour aucune part. Il n’a bu que de l’eau, tant que sa santé, sa jeunesse ne lui ont pas rendu l’usage du vin indispensable[1]. Il n’a fait qu’« essayer philosophiquement l’ivresse ». Elle le rendait doux et bon : il en conclut qu’il possédait réellement des qualités de douceur et de bonté, s’appuyant sans doute sur l’adage : In vino veritas. Le mot gris, plusieurs fois répété dans Mes Inscriptions, ne saurait donc se prendre à la lettre : Restif était de ceux que la première libation étourdit. Ivrogne, d’ailleurs, il n’eût pas été le travailleur que nous connaissons.

Si l’amour de la vérité lui suggéra le désir d’être auteur, ce fut celui de la femme qui fit jaillir l’étincelle. Aussi s’écriait-il toujours, devant la maison de Rose Bourgeois, inspiratrice de La famille vertueuse, son premier livre : « Salve, à domus quæ me fecisti scriptorem ! »

Comme tous les débutants, il avait commencé par imiter. A Auxerre, il aimait à lire La princesse de Clèves et les romans de madame de Villedieu. Madame Riccoboni fut son premier modèle[2]. Bientôt il connut « cet état d’effervescence sans lequel il n’y a ni auteurs, ni poètes », et sentit « l’insurmontable besoin d’écrire », remplacé par « un feu divin qui le remplit tout entier ». Mais l’imagination, loin de le pousser à la création d’êtres fictifs, le dirigeait vers l’étude de l’homme, vers la peinture des caractères.

  1. Monsieur Nicolas, t. X, p. 247.
  2. Ibid., t. XIV, p. 6.