Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/35

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Adieu, mes Lecteurs, Quelques-uns d’entre vous me rendront justice. J’ai fait lire mes huit parties imprimées, à deux hommes d’un caractère opposé : un flegmatique, et un très ardent. Le premier l’a trouvé intéressant, et ne m’a pas découragé ; le second a été transporté, entraîné par la vérité ; il passait les nuits ; il sanglotait, il pleurait : ses éloges étaient outrés, mais consolants… Vous allez en juger, Lecteurs. Je vous livre mon moral, pour subsister quelques jours de plus, comme l’Anglais condamné vend son corps. Omnia jubet paupertas et facere, et pati !… Au reste, ma vie ne doit pas être longue : hier 27 brumaire an 5, j’ai manqué d’être assassiné par un certain Ettugaled, gendre d’une héroïne des Contemporaines. C’était le soir, dans une rue solitaire ; à Lyon, c’aurait été fait de moi. J’ai de plus trois infirmités mortelles. À quoi tient ma vie ? et devrai-je la regretter, lorsque le besoin ou la douleur me la raviront ? Tout mon travail, quoique redoublé, ne suffit plus, depuis sept ans, à payer mes dettes : c’est qu’il devient nul pour le produit.

Lecteurs, avant de me mettre nu devant vous, il fallait en donner les raisons.