Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 1, 1883.djvu/48

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parler de leur généalogie. Pierre les écoutait avec impatience, et quelquefois les ironisait ; car on ne persifflait pas encore. Un jour de grand régal (c’était la fête patronale de Nitry), un comte d’Arcy se formalisa. Pierre, qui sans doute s’y était attendu, lui répondit : — « Je n’ai critiqué votre généalogie, que parce que la mienne date de plus loin, qu’elle est mieux prouvée, plus illustre, plus variée, mieux raisonnée. — Ha ! voyons ! s’écrièrent tous les gentilshommes. — « C’est celle de sa femme » (dit celui qui s’était fâché). — « Non, c’est la mienne, celle des Restif, autrement des Pertinax, comme on les nommoit, avant que la langue Françoise fust employée ès actes publics. — Voyons ! voyons ! répéta toute la Compagnie. Pierre quitta la table et, monté sur la double échelle de sa petite bibliothèque, il tira du plus haut rayon, de vieux parchemins roux et rongés, écrits en Gothique jusqu’à la pénultième génération. Il les déposa sur la table. Les gentilshommes chasseurs, encore qu’ils n’eussent qu’à moitié dîné, se jetèrent dessus, en reconnurent l’incontestable antiquité, mais ne purent lire. Pierre appela son fils Edme, qui déchiffrait couramment toutes les anciennes écritures, et lui donna les parchemins, en lui commandant de bien prononcer. Le jeune