Aller au contenu

Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/12

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mère, les caprices adorés de l’enfant : il quitta cette maison.

Tandis qu’il était chez sa sœur Marie, il aperçut un jour un de ces aventuriers de dévotion, dont les cheveux plats et luisants annonçaient la cafardise. L’abbé Thomas se sentit attiré par la sympathie. « Sûrement, c’est un honnête homme ! » dit-il à Marie. — « Il passe toutes les semaines par notre rue. L’abbé Thomas le guetta au retour et le salua… À l’aspect de cheveux plats et luisants comme les siens, Fusier sourit de l’air le plus caponnement dévot : — « Mon frère, je suis connu de vous ? — Je vois votre piété ; c’est elle que je salue… Entrez, homme de Dieu ! » Fusier entra. Qu’on se représente un gros et beau Normand, d’environ six pieds, ayant la face riante et benoîte, un honnête embonpoint, des joues vermillonnées, de grands yeux qui se fermaient à demi, de la manière la plus cafardement dévote, mangeant fort, buvant large, dormant comme un idiot, se vêtissant cossu, et parlant toujours de pénitence, de mortification. C’était un charlatan. Il lorgna Marie, qui lui ôta son manteau, sous lequel était une besace, en l’invitant à diner. Pendant qu’on mettait le couvert dans la belle chambre, l’abbé Thomas se fit connaître pour un élève de M. de Caylus (à ce mot, on lui sauta au cou). Il fit, en deux mots, l’histoire de son préceptorat… Fusier était maître des enfants de chœur de Bicêtre ; mais son vaste génie avait étendu cette place : au lieu de six ou huit petits tondus calottés