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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 2, 1883.djvu/227

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jusqu’à la porte de Beine ; le presbytère et l’église exceptés, il n’y eut d’épargné que le petit quartier au dessus du vent, qui avoisine la porte de Préhy. La récolte entière du blé fut réduite en cendres ; le vin même fut perdu, les tonneaux ayant été ou écrasés, ou ensevelis sous les voûtes, ou enfumés. On ne fut maître du progrès des flammes que le soir. Les poutres brûlèrent plus de trois jours sans qu’on pût les éteindre, faute d’eau.

Le malheur qui venait d’arriver suspendit tous les mécontentements particuliers ; on ne songea plus qu’à la calamité publique. Le curé de Courgis est réellement le père de ses paroissiens ; il s’occupe sans relâche à les secourir. D’abord il réclama les secours de ses voisins, il se fit mendiant, pour ainsi dire, afin d’empêcher ses habitants de le devenir. Il les exhortait à rester chez eux, à s’occuper à déblayer leurs masures, leur promettant de les nourrir. Ce qu’il fit. Mais les mauvais sujets abusèrent de la circonstance pour vagabonder ; le curé écrivit au subdélégué d’Éon, père de la Chevalière, qui les fit rentrer dans leurs paroisses. M. de Caylus envoya du riz et du blé ; le seigneur baron prêta de l’argent pour rebâtir, et des semences. Nous fûmes occupés tout l’hiver, Huet, Melin et moi, à copier des lettres circulaires pour tous les curés de vingt lieues à la ronde. Des habitants de confiance les portaient ; les pasteurs faisaient eux-mêmes la quête et l’envoyé la rapportait sans déchet, car il était nourri dans sa route par les curés ou les riches habitants. Ces