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AU PAYS DES KANGAROUS


CHAPITRE XXVII

L’aire de l’aigle. — Inquiétudes dans la vallée solitaire. — Les prisonniers volontaires. — Le rapport de l’espion. — L’ennemi aux portes. — Un traitre dans le camp. – Dispersion des envahisseurs. – L’évasion heureuse. – Un excellent voyage.


Quelques jours s’étaient écoulés, et cette retraite absolue semblait fatigante à tous les habitants de la vallée solitaire. Baldabella, accoutumée à la plus grande liberté d’action, manifesta l’intention d’aller pêcher au clair de lune. Comme il y avait moins de danger pour elle que pour les « visages blancs » on la laissa aller, et quand elle revint, elle rapporta de magnifiques poissons, qui changèrent agréablement l’ordinaire des voyageurs.

Hugues et Gerald demandèrent à leur tour, malgré l’insuccès de leur dernière chasse, l’autorisation de « sortir de leur cage ».

« Je m’y oppose, répliqua Marguerite. Vous avez assez d’espace dans la vallée pour prendre vos ébats ; contentez-vous de ces limites.

— Rien ne nous empêche, je pense, de grimper sur ces hautes roches, dit alors Hugues. Nous voulons trouver les nids de ces oiseaux étranges qui volent dans l’espace. Il ne nous arrivera pas le moindre mal ; car nous pouvons monter comme avec une échelle, tant les broussailles sont courtes et dures. Viens, O’Brien ; allons inspecter les merveilles de notre volière. »

Max Mayburn, qui aimait tant à s’occuper d’histoire naturelle, eût bien voulu suivre les jeunes gens dans leur excursion ; aussi ne put-il pas s’opposer à leur départ. Ceux-ci ne se firent pas donner deux fois la permission. En moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire, ils avaient disparu au milieu des rochers, grimpant souvent le long des parois perpendiculaires, à l’aide des branches qui poussaient dans les interstices de la pierre. On vit alors tourbillonner des milliers de pigeons troublés dans leur quiétude, des volées de kakatoès qui piaillaient à étourdir ; et enfin les hardis explorateurs parvinrent près de l’aire de deux aigles, qui défendaient hardiment l’asile de leurs aiglons.

« Je ne suis pas d’avis d’attaquer les oiseaux de proie : d’ailleurs, nous n’aurions peut être pas le dessus. Où allons-nous diriger nos pas ? dit Hugues à Gérald.

— Montons seulement jusqu’au sommet, dit O’Brien. Je voudrais me rendre compte du panorama qui nous entoure. »

En effet, les deux amis grimpèrent encore jusqu’à la cime la plus élevée. Gérald arriva le premier sur un pic pointu comme une colonne, et ressemblant à un dieu reposant sur le point culminant d’une « montagne caressant le ciel »,