prétend remonter le cours de Thistoire, reculer de mille ans,
critique du Kodjiki. Motoori entreprit aussitôt cette œuvre colossale, qui, à peine commencée et lue en manuscrit, fonda sa réputation et lui attira des centaines d’élèves ; mais, en pleine gloire, il resta toujours fidèle à l’homme qui lui avait montré le chemin et dont il aimait à se dire l’humble disciple ; c’est même grâce à lui seul que les titres scientifiques de Maboutchi, un peu oubliés après sa mort, furent remis en lumière, sauvegardés et conservés enfin jusqu’à nous. Le Kodjiki-denn, commencé en 1764, ne fut achevé qu’en 1796 ; et l’impression de l’ouvrage, inaugurée en 1789, ne devait être terminée qu’en 1822, longtemps après la mort de l’auteur. En 1801, pensionné par les princes et entouré d’admirateurs, Motoori visita une dernière fois Kiôto, où de véritables foules se pressaient pour entendre ses leçons et où les plus hauts personnages de la cour recherchèrent son enseignement. Il mourut dans l’automne de la même année, et fut enterré sur la colline du village natal, dans la tombe qu’il s’était lui-même préparée : une simple pierre ne portant que son nom, à l’ombre d’un sapin austère et d’un cerisier en fleurs. Outre les 44 volumes du Kodjiki-denn, il laissait de nombreux ouvrages : en tout plus de 180 volumes répartis en 55 ouvrages divers. Les plus intéressants pour nous sont : le Nahobi no Mitama, ou l’Esprit de redressement, 1771, qui devait faire partie ensuite du Kodjiki-denn ; le Kouzouhana, 1780, réponse à un pamphlet éphémériste d’Itchikawa Tatsoumaro ; le Kennkiôdjinn ou le Fou mis au carcan de fer, réponse à une autre attaque contre les anciens livres shinntoïstes ; un examen critique des deux premiers livres du Nihonnghi, les plus importants pour l’étude du Shinntô (1789) ; des commentaires sur deux de nos rituels, en particulier sur celui de la grande Purification (1795) ; deux ouvrages de controverse plus spéciaux au sujet de la déesse du Soleil et de la déesse de la Nourriture ; une édition annotée des messages impériaux du VIIIe siècle ; enfin le Tamagatsouma, carnets de notes en 15 volumes publiés après sa mort, et où se trouvent des renseignements précieux sur les rites du shinntoïsme. — Hirata Atsoutané (1776-1843) fut le dernier de ces grands érudits ; mais tandis que Motoori avait été surtout un historien nationaliste, Hirata fut un théologien animé d’un véritable esprit religieux. Né dans le lointain district d’Akita, au nord du Japon, d’une famille de samouraïs qui prétendaient remonter à la déesse du Soleil, il passa sa jeunesse à étudier le chinois, l’escrime, bref à recevoir l’éducation classique. Mais à vingt ans, poussé par d’autres besoins intellectuels, il écrivit un jour une lettre d’adieux à ses parents, quitta sans esprit de retour la maison paternelle, partit pour Edo avec un écu en poche, et là, évitant de rencontrer les fonctionnaires ou amis de sa province qui auraient pu le soutenir, mais dont la société l’aurait distrait de son dessein, il se mit tout seul à la recherche d’un maître savant et vertueux qui put diriger ses études. Pendant cinq ans, il vécut dans la misère, tantôt faisant le métier de pion, tantôt se livrant à des besognes manuelles, lorsqu’en 1800, un bon samouraï l’ayant adopté, il put enfin se remettre au travail. L’année suivante, il lut pour la première fois les ouvrages de Motoori, qui le remplirent d’enthousiasme ; il courut bien vile chez le vieux savant et devint son disciple, par malheur deux mois seulement avant