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nité de ses personnes, de l’énergie de sa fécondité, de la force de sa puissance, de l’éclat de sa sagesse, des coordinations et des rapports de son amour.

Mais les Pères de l’Église ont donné d’autres interprétations de ce même mot « au commencement. »

En grec, dit Tertullien, le mot exprimant le « commencement » est ἀρχή, et signifie non-seulement la principauté de l’ordre, mais aussi la principauté du pouvoir ; et c’est pour cela que chez les Grecs les magistrats et les princes s’appelaient αρχοντες. On peut donc, selon cette autre signification, prendre le mot « au commencement » comme indiquant le pouvoir et l’autorité ; car c’est en grand prince, c’est en étalant le pouvoir le plus étendu, la plus absolue autorité, que Dieu a créé le ciel et la terre.

On peut entendre, dit encore Tertullien, le mot « au commencement » par rapport à la Sagesse ; car tout ce que Dieu a fait, il l’a fait dans sa sagesse ; omnia in sapientia fecisti ; puisque avant de le faire au dehors il l’avait déjà fait en lui-même, en pensant et disposant le tout dans sa sagesse.

Si vous voulez donc absolument que Dieu ait eu besoin de quelque chose pour faire le monde, eh bien, sachez que Dieu l’a vraiment trouvée, l’a vraiment eue présente à lui cette chose, mais incomparablement plus noble et plus apte à l’œuvre de la création ; car ce n’est pas la matière éternelle que les philosophes ont rêvée, mais la sagesse éternelle que les prophètes nous ont révélée et nous ont fait comprendre ; c’est dans cette sagesse que Dieu a tout fait, puisqu’il a fait le tout par elle et avec elle ; omnia in sapientia fecisti.

Dieu, dit saint Augustin, ayant créé au commencement ou dans le principe, le ciel et la terre, signifie aussi que Dieu a tout créé en Jésus-Christ. Car le Verbe était auprès du Père, ce Verbe divin par lequel et dans lequel tout a été fait. C’est pour cela que le Sauveur du monde, sommé un jour par les juifs de dire qui il était, répondit : « Je suis le principe parlant avec vous. »

Ce mot « créa » est aussi, dit saint Ambroise, d’une incompréhensible beauté. Dieu créa, signifie que Dieu a accompli son œuvre avant que personne n’eût pu se douter que Dieu allait opérer ; et que ce qui a été opéré a été connu même avant l’opération ; « Dieu créa, » signifie qu’il n’a pas eu besoin de calculer la perfection de son art, la puissance de sa vertu, celui qui, dans un instant et par un acte de sa volonté, a épuisé la majesté d’une œuvre aussi grande. « Dieu créa, » signifie que Dieu a fait, avec autant de rapidité, que ce qui n’était pas, fut ; que dans la création, ni la volonté n’a été un seul instant séparée de l’opération, ni l’opération de la volonté, et que vouloir et créer fut, pour Dieu, un seul et même acte, une seule et même opération.

D’après donc cette admirable manière de s’exprimer de l’écrivain sacré, l’idéal du monde est sorti tout fait, tout d’un jet de l’intelligence divine, comme le fait a rejailli complet du son de sa parole ; point d’intervalle entre l’idée et la parole, ni entre la parole et la chose ; point d’intervalle entre la cause et l’effet, entre la parole et le fait, le comman