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revue musicale de lyon

mélodies d’origine incomparablement plus profane ; pareille aberration toucherait au sacrilège !

Le second abus, plus fréquent que le premier, consiste dans l’exécution, par un instrument soliste (violon, violoncelle et même, Dieu me pardonne, mandoline !) par un orchestre, ou même par l’orgue, de mélodies purement profanes ou théâtrales[1]. La saison dernière, à la messe des baigneurs d’Aix-les-Bains, j’ai entendu, exécuté délicieusement d’ailleurs, le quatuor à cordes, la mélodie de Massenet, dont le refrain est celui-ci : « Les coccinelles sont couchées. » D’autre part, la marche nuptiale de Lohengrin, certains passages de Parsifal, la marche nuptiale du Songe d’une nuit d’été, de Mendelssohn, n’ont-ils pas vraiment trop longtemps sévi dans les messes de mariage ? Faut-il donc changer l’Église en salle de concert et les offices liturgiques en auditions ? N’y a-t-il dans le répertoire de musique vraiment religieuse, aucune pièce de valeur ? Les œuvres des Maîtres du xvie siècle, de Bach, d’Haëndel, et, de nos jours, celles des meilleurs des maîtres de l’orgue sont-elles donc inconnues ?

Il serait bon de se rappeler que l’Église c’est la maison de Dieu, où l’on prie, harmonieusement, tant qu’on voudra, mais réellement ; et que les convenances ne sont pas moins les convenances quand elles ont pour objet le culte divin que quand elles visent la vie de salon.

Jean Vallas.
réflexions musicales

DE LA SIMPLICITÉ

EN MUSIQUE
et de l’Architecture dans sa Composition
(suite et fin)

En effet (et c’est à cela que je voulais arriver), de même que la beauté et la solidité d’un édifice dépendent plus de l’harmonie de ses proportions, de l’élégance de ses lignes et de la force de ces fondations que des détails qui l’ornementent, de même la beauté et la durabilité de la symphonie seront assurées, moins par l’ornementation de son écriture que par les heureuses proportions de son plan, et la bonne répartition des épisodes selon l’enchaînement des tonalités. C’est sur ces points que devrai porter, tout d’abord l’attention du critique ; le reste ne vient qu’après. Les chapiteaux et les frontons peuvent être fouillés de délicates sculptures ; de merveilleuses tapisseries, ourdies dans la trame d’un contrepoint recherché, peuvent décorer les salles et les galeries, retraçant des scènes amoureuses ou terribles : toutes les ressources d’une instrumentation colorée peuvent encore apporter à la décoration l’appoint de précieuses mosaïques, de fresques et d’orfèvreries ; ou bien la nudité des murs, ainsi qu’en un temple grec, pourra se contenter de quelques peintures monochromes et des reflets du marbre poli : cela n’aura qu’une influence nulle sur la solidité, et secondaire sur la beauté de l’édifice.

Simple ou compliqué, on peut faire beaucoup dans les deux genres, et le Parthénon est un chef-d’œuvre aussi bien que Notre-Dame de Paris.

  1. Au moment de mettre sous presse nous trouvons dans un journal de la Loire le compte-rendu de la Messe donnée par une Estudiantina pour fêter la Sainte-Cécile. Voici le programme exécuté à l’église par cette société de mandolines : Salut à Roanne, Pensiero melodico (morceau plein de difficultés et d’un grand effet), Échos des Alpes. Nous nous demandons comment l’autorité paroissiale peut tolérer de pareilles inconvenances (N. D. L. R.).