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ni Vincent d’Indy, ni son œuvre, ne se mettent volontiers au balcon : nul cabotinage chez l’un, nul appât jeté, par l’autre, au goût du jour. Comme chez un Vigny, comme chez un Dagnan-Bouveret, il y a là un art qui ne se soucie que d’obéir aux nécessités intérieures de sa création, confiant que son heure viendra, tôt ou tard, par le progrès même et la marche en avant du goût du public. Adversaires et partisans du maître ont toujours été d’accord pour rendre hommage à la noblesse de cette attitude et de la mission, toute d’apostolat et de culture supérieure, qu’il s’est assignée. « La mission de l’artiste, disait-il en inaugurant les cours de la Schola Cantorum, n’est pas de suivre le public, mais de le précéder et de le guider. C’est le respect de cette mission qui caractérise tous les grands… »

Fernand Baldensperger.

Le Concert de la Schola

Voici le programme du grand concert qui sera donné le mercredi 7 décembre, salle des Folies-Bergère, par la Schola Cantorum Lyonnaise, avec le concours de Mlle M. de la Rouvière, de MM. L. Bourgeois et Georges Castel, des chœurs et de l’orchestre de la Schola Cantorum Lyonnaise (250 exécutants), sous la direction de M. Vincent d’Indy :

Première Partie :

Premier acte d’Alceste de Gluck

Alceste : Mlle de la Rouvière. — Admète : M. G. Castel. — Le Grand Prêtre et le Héraut : M. L. Bourgeois. — Les chœurs et l’orchestre.

Deuxième Partie :

Le chant de la Cloche, légende dramatique de V. d’Indy,

1er tableau : Le Baptême. La mère : Mlle de la Rouvière. — Les chœurs et l’orchestre.

2e tableau : L’amour. Lénore : Mlle de la Rouvière. — Wilhelm : M. G. Castel.

3e tableau : L’incendie. Wilhelm : M. G. Castel. — Johann : M. L. Bourgeois. — Les chœurs et l’orchestre.

Nous donnons ci-dessous quelques lignes de commentaires sur les œuvres de Gluck et de V. d’Indy.

Alceste

Tragédie-Opéra

On ne saurait mieux se préparer à entendre l’Alceste de Gluck qu’en relisant les déclarations que l’auteur lui-même a pris soin de faire, dans son épître dédicatoire au grand duc de Toscane, écrite pour l’Alceste italienne composée en 1761, sur le poème de Calzabigi. En voici les passages les plus importants :

« Lorsque j’entrepris de composer la musique d’Alceste je me proposai de la dépouiller entièrement de tous ces abus qui, introduits soit par la vanité mal entendue des chanteurs, soit par la trop grande complaisance des maîtres, depuis si longtemps défigurent l’opéra italien, et du plus pompeux et du plus beau de tous les spectacles, en font le plus ridicule et le plus ennuyeux. Je songeai à réduire la musique à sa véritable fonction, qui est de seconder la poésie dans l’expression des sentiments et des situations de la fable, sans interrompre l’action ou la refroidir par des ornements inutiles et superflus, et je crus que la musique devait être à la poésie, comme à un dessin correct et bien disposé, la vivacité des couleurs et le contraste bien ménagé des lumières et des ombres, qui servent à animer les figures sans en altérer les contours…

J’ai imaginé que l’ouverture devait prévenir les spectateurs sur l’action qui va se représenter, et en former pour ainsi dire, l’argument ; que le concours des instruments devait se régler en proportion de l’intérêt et de la passion, et qu’il ne fallait pas laisser dans le dialogue une disparate tranchante entre l’air et le récitatif, afin de ne pas traquer à contre-sens la période, ni interrompre mal à propos la force et la chaleur de l’action.

J’ai cru, en outre, que mes plus grands efforts devaient se réduire à rechercher une belle simplicité ; et j’ai évité de faire parade