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Page:Revue de Bretagne, tome 9, 1861.djvu/504

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sèrent, et les restes de la fille du peuple furent sauvés ; et les paysans de Pibrac les entourèrent encore d’hommages jaloui, à ce point que, lorsqu*en 1843, le vénérable évéque de Luçon, M ? r Baillés, alors grand-vicaire de Toulouse, vint faire les dernières informations pour en arriver à la béatification, il se fit une émeute au village, — c’est M. Grimouard de Saint-I ^urcnt qui nous le raconte dans son charmant livre des Fleurs de Sainte-Enfance, — et Ton eut toutes les peines du monde à pénétrer dans Tég^se.

— c Non ! non ! s’écriaient ces braves gens, point de béatification ! sainte > Germaine nous guérit quand nous sommes malades, cela nous suffît ; 1 elle est à nous, nous voulons la garder ! > Notre Saint-Père le Pape Pie IX proclama Germaine Cousin bienheureuse, le 7 Mai 1854.

Nantes, qui marche à la tète des villes de Bretagne par son zèle religieux, ne pouvait laisser cette sainte sans hommages, et la chapelle des Enfants-Nantais, où se réunissent les enfants confiés aux soins des prêtres du diocèse, vient de lui dresser un autel.

Samedi, 15 de ce mois, c’était donc fête aux Enfants-Nantais. Tous les arts s’v donnaient rendez-vous : la musique, la peinture et la sculpture. L’autel en pierre, les peintures décoratives de M. Yiau, sont de véritables œuvres d’artistes. Il y a là une charmante statue de la sainte due au ciseau de M. Potel ; rien de plus suave que cette petite paysanne appuvée sur sa houlette, ayant à ses pieds son agneau, moins innocent qu’elle, la tète inclinée, et songeant au ciel.

Mais le morceau capital, c’est la fresque exécutée par M. Le Hénaff, à qui nous devons déjà la splendide frise de N.-D.-de-Bon-Port. Le peintre a choisi la scène dont nous avons parlé tout à l’heure. — Au bas du tableau, c’est la terre, la nuit ; deux moines, étendus au pied d’un arbre, se réveillent et contemplent ravis le ciel ouvert et le groupe des vierges qui s’avance. Au milieu de ses compagnes et debout, se dresse la bienheureuse Germaine. Elle ne marche pas encore, elle s’éveille, elle pose sa main sur ses yeux, non pour les fermer, ffrand Dieu ! mais pour les ouvrir, pour chasser loin d’elle ces nuages de la terre, pour contempler à son aise le soleil de Justice qui se lève. — Deux autres sujets plus petits sei^vent de rétables ; l’un représente le miracle du torrent, l’autre celui des roses.

Disons-le donc, il y a lieu de nous féliciter du mouvement artistique qui se manifeste au milieu de nous et qui trouve son plus puissant, son seul moteur dans nos sentiments de foi chrétienne, dans nos aspirations catholiques. Voyez, en effet : c’est l’architecture qui s’épanouit dans les basiliques élevées comme par enchantement sur tous les points de notre ville : Saint-Nicolas, Saint-Clément, N.-D.-de-Bon-Port, La Madeleine, Saint-Clair, Toutes-Joies, N.-D.-de-la-Salette, les Minimes, que le sou de la charité rachète et restaure ; c’est la peinture sur verre qui se réveille et répare les désastres des démolisseurs de la fin du siècle dernier ; c’est la sculpture qui reprend l’œuvre interrompue des tailleurs d’images à la Cathédrale, qui crée le beau fronton de Notre-Dame, la symbolique épopée de N.-D.-de-la-Salette ; c’est la peinture qui suspend ses grandes pages sur les murailles de nos édifices sacrés, en fait de véritables musées, nous donne, hier la frise de Notre-Dame, aiyourd’hui la chapelle de la bienheureuse Germaine, et qui demain va transformer la rotonde des Enfants-Nantais en un temple tout illustré des exploits de nos saints locaux. Noble et belle pensée qui consiste à exalter au nom de Dieu toutes les grandeurs légitimes et a sceller toujours devant l’autel es deux pierres sur lesqueUes repose tout l’empire des Francs : le patriotisme et fa foi, V*e Edouard Sioc’han de Kersabiec.