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SIR HOVENDEN WALKER

par un vent frais est-sud-est, pour continuer cette longue série de contrariétés, d’hésitations et de malheurs, qui devait se terminer le long des falaises de l’Île-aux-Œufs.

Conformément à ses ordres, l’amiral mettait le cap sur Boston, où il était allé 25 ans auparavant, en 1686.

À bord, sur 12,000 hommes d’embarquement, tous — l’amiral et le général exceptés — ignoraient l’objet de l’expédition. À 153 lieues des îles Scilly, Walker avait fait mettre en panne et distribuer à chacun de ses capitaines un pli cacheté, contenant le nom du lieu où l’escadre devait se rallier. Pourtant ces précautions avaient été inutiles, et le précieux secret avait été mal gardé.

Le 2 mai, Walker ayant été forcé par une saute de vent d’ancrer à Plymouth, pendant que ces transports se réfugiaient à Catwater, un matelot français embarqué sur le Medway, un renégat qui prétendait avoir fait quatre voyages dans la rivière du Canada, ayant entendu dire dans un des caboulots de la ville, qu’une flotte destinée à la conquête de la Nouvelle-France était de passage en ce moment, se fit offrir à l’amiral anglais pour la piloter à Québec. Walker épouvanté, se prit à dissimuler devant lui, assurant qu’il allait croiser dans la baie de Biscaye, et le fit embarquer à bord du l’Humber, avec ordre de le bien traiter, ce qui devait être du goût de ce nouveau Palinure, car le colonel Vetch, donnant plus tard des notes sur le compte de ce transfuge, écrivait du détroit de Canso à l’amiral, que le pilote français lui faisait non-seulement l’effet d’un ignorant, d’un prétentieux, d’un cancre et d’un ivrogne, mais encore qu’il était sous l’impression qu’il tramait en sa tête rien qui vaille[1]. Walker comptait beaucoup sur l’expérience de cet homme pour éviter les dangers de la navigation du St. Laurent, dangers que son imagination exagérait au point de croire, qu’une fois l’hiver venu, le fleuve ne formait, jusqu’au fond, qu’un bloc de glace. La lettre du colonel venait de détruire une de ses plus chères illusions.

  1. August 1711 — At sea.

    Sir,

    I could not but judge it my duty to give you a caution with regard to your French pilot, whom I would have you by no means depend upon ; for I find him to be not only an ignorant, pretending, idle, drunken fellow, but fear he is come upon no good design.

    Sir, your’s devoted to serve you,

    Sam. Vetch.