Page:Revue de Paris, 29è année, Tome 5, Sep-oct 1922.djvu/105

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» Action de la débauche ; horreur glacée qui en est ressentie. »

Dans un carnet encore inédit de Dostoïevsky, est inscrit une variante de la même définition :

« Germes de fortes passions charnelles.

» Penchants à la domination illimitée et certitude de posséder une autorité propre : il déplacerait des montagnes. Et il est porté à éprouver sa puissance.

» La lutte est sa seconde nature. Mais une lutte calme, non agitée.

» Méprise le mensonge de toutes ses forces. »

Revenons à la feuille 8 du cahier :

« Il ne cesse de se préparer à quelque chose, sans savoir à quoi et, fait étrange, ne s’en soucie guère, comme s’il était fermement convaincu que cela viendra tout seul. »

Plus loin : « Désir frénétique d’étonner tout le monde par des actes soudains d’effronterie, mais non par sentiment d’amour-propre. »


« Trait essentiel et constant. »

Feuille 7 : » Irrespect pour les proches, non par le fait du raisonnement, mais par un sentiment de répulsion pour eux. On le bat, on le fustige pour cette répulsion. Il se renferme davantage en soi et hait plus encore. Mépris hautain pour ses persécuteurs et promptitude de jugement. Il commence à sentir que le jugement ne doit pas être irréfléchi et que, pour s’en garder, il faut accroître la force de volonté.

Feuille 12 : » Sa nature impérieuse lui inspire, dès sa prime enfance, de la répulsion pour les gens. Il se dit, sous l’influence de ce sentiment : « J’agirai avec audace, je ne m’abaisserai pas, jusqu’à la flatterie et l’habileté d’un Brin[1] »

» Mais il se dit aussi : « Oh ! si je voulais accepter le rôle du flatteur Brin, que de choses j’aurais pu accomplir ! »

» Et il se met parfois à réfléchir : « Si je me faisais flatteur ? C’est aussi une force que d’être constant dans la flatterie. Non, je ne veux pas, c’est vil ; il vaut mieux avoir pour arme l’argent ; ainsi, qu’ils le veuillent ou non, ils viendront se prosterner à mes pieds. »

  1. Allusion occasionnelle à un personnage du futur roman.