Page:Revue de Paris, 29è année, Tome 5, Sep-oct 1922.djvu/876

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occuper la position ennemie, mais aussi à l’artilleur de pousser rapidement en avant ses canons et en rendant au cavalier son rôle séculaire d’exploration et de poursuite, que le cheval, trop fragile, ne lui permet plus de remplir.

L’adoption de la chenille est peut-être appelée à marquer dans l’art de la guerre, tout au moins de la guerre de position, une révolution du même ordre de grandeur que jadis l’invention de la poudre.

Le canon, en démolissant les donjons féodaux, dont les hautes murailles avaient jusque-là défié toutes les attaques, avait forcé l’adversaire à chercher le salut dans l’invisibilité et à se terrer de plus en plus. La tranchée est ainsi devenue la panacée universelle du combat. Mais les défenseurs s’y maintiendront-ils désormais avec leur belle opiniâtreté de jadis, quand ils se sauront exposés à tout moment, soit de jour, soit de nuit, aux irruptions subites de ces monstres d’acier qui, sans souci des obstacles, broieront tout sur leur passage ? On sera obligé de chercher une autre parade. Laquelle ? Seul l’avenir nous le dira. Mais d’ores et déjà, on voit le rôle immense que la chenille est appelée à jouer.

Les États-Unis sont en train de s’organiser une artillerie sans chevaux, entièrement à moteur chenillé. Nous serons peut-être nous aussi obligés d’en venir là un jour, quand le problème du remplacement de l’essence par un autre carburant sera résolu et que nous cesserons ainsi d’être tributaires de l’étranger pour l’alimentation de nos moteurs.

Alors, si l’on ne peut faire dépendre les chars ni de l’artillerie, ni de l’infanterie, à qui donc les confier ? Mais à eux-mêmes. Il faut leur conférer leur autonomie, comme on a fait pour l’aviation, et leur donner, tout au moins provisoirement, tant que l’organisation désuète de notre administration centrale de la guerre n’aura pas été refaite, un directeur particulier, c’est-à-dire les subordonner à une autorité responsable, ayant qualité pour parler directement au ministre sans passer par la tutelle des autres.

La loi d’organisation prévoit 21 régiments de chars et ce