Page:Revue de Paris, 30e année, Tome 3, Mai-Juin 1923.djvu/690

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UNE CAMPAGNE
DE TRENTE-CINQ ANS


Le 31 mai 1888 — il y a eu hier trente-cinq ans — deux douzaines d’hommes de bon vouloir s’assemblaient à Paris afin d’aviser au moyen de « rebronzer la France » par le sport. La proposition avait plu à Jules Simon lorsqu’un mois plus tôt, j’étais allé quêter sa présidence. « Et combien de temps m’avait-il demandé avec son petit sourire, sceptique et lassé, qui recouvrait tant de réserves d’infatigable enthousiasme, combien de temps faudra-t-il pour rebronzer la France ? » — « Vingt ans, » avais-je répondu sans hésiter. Cette réponse l’avait satisfait. Un moindre délai eût peut-être provoqué de sa part une décision négative mais l’estimation lui paraissant vraisemblable et prudente, il avait aussitôt fait sienne l’entreprise que mes cinq lustres offraient à son activité septuagénaire. Il la jugeait originale et opportune. Au soir de sa vie, il se sentait prêt à la patronner effectivement. Car ce ne fut point un patronage verbal. Jules Simon présida des courses à pied et suivit en bateau des régates. Il s’intéressa à la longue-paume et au foot-ball. Il donna des départs et distribua des prix. Si bien qu’après avoir trouvé que tout ce plein air faisait une heureuse diversion avec l’existence jusque-là trop recluse de son mari, il advint que madame Jules Simon me reprochât parfois le surmenage nouveau que j’avais imaginé de lui procurer.

L’influence du philosophe sur les petits potaches ainsi mis