Page:Revue de Paris, 40è année, Tome IV, Juil-Août 1933.djvu/139

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dynasties Rostand et Richepin, nous offre un autre exemple de cette procession et succession du talent poétique, là où est en jeu (et nulle part il n’y est plus qu’au théâtre) l’élément de métier et d’ateliers.

C’est précisément à ce titre de délégué au métier pur que nous avons dû donner une place à Catulle Mendès parmi les quatre Épigones. Nous ne nous dissimulons que celui-là est un mort authentique et intégral. Je crois bien qu’il ne reste de sa poésie qu’un vers d’Hesperus sur un paysage glacé :

Un jet d’eau qui montait n’est pas redescendu

Mais enfin le Parnasse a été sa chose. Dès 1864, avec sa Revue fantaisiste, il en est l’animateur, le metteur en train, l’homme d’affaires, le serre-file ou le commissaire du cortège pompeux. Il en a le premier écrit l’histoire, avec sa Légende (peu sûre) du Parnasse contemporain. Il a été chargé, à l’occasion de l’Exposition de 1900, comme son beau-père Gautier l’avait été lors de l’Exposition de 1867, d’écrire le Rapport officiel sur l’histoire de la poésie depuis cette date de 1867, et il a fait tourner entièrement cette histoire autour du Parnasse. Son œuvre poétique considérable est elle-même une Exposition Universelle du Parnasse, je veux dire un musée d’échantillons de toute la production parnassienne. Mais, comme dans ces bâtiments d’Exposition, il a fallu peu de temps pour que tout fondît en déblais et en plâtras. De sa race (c’était un de ces israélites bordelais, venus autrefois du Portugal), il tenait cette aptitude aux affaires, aux fondations de revues avec des combinaisons et des primes, et surtout ce rôle d’intermédiaire et d’organisateur tourbillonnant où on le vit s’agiter pendant quarante ans. Il ressemblait à son père, un industriel à idées qui ne fit pas fortune, Tibulle Mendès (ces noms de poètes dans cette famille juive étaient tout un programme, y faisaient la catégorie de l’idéal, la part de Dieu). Et Mendès brûla vraiment du feu sacré. Il eut sa manière à lui d’adorer la poésie, mais il l’adora. Il manifesta son amour pour les poètes en les imitant. Il a fabriqué du Hugo, du Baudelaire, du Banville, et il n’est d’ailleurs supportable que lorsqu’il imite quelqu’un ; ses mièvres bonbons personnels, où le sucre enveloppe un grain de