Aller au contenu

Page:Revue de Paris - 1829 - tome 1.djvu/209

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou éclairer la nation. Dryden, dans une de ses préfaces, appelle Société du Diable le club de King’s head, dont les membres portaient à leurs chapeaux un ruban vert, tandis que les Torys se distinguaient alors par un ruban rouge. Depuis l’expulsion des Stuarts, les jacobites se consolaient dans leurs clubs en buvant à la santé du Roi… mais en plaçant leur verre derrière une carafe, ce qui plaçait ainsi le Roi de l’autre côté de l’eau. Les principaux partisans de la maison de Hanovre s’assemblaient de leur côté à ce club de Kit-Cat, auquel il est fait tant de fois allusion dans les romans et les pièces de théâtre. Là se rassemblaient Marlborough, Godolphin, Wharton, Newcastle, etc., etc., parmi les hommes titrés ; Steele, Addisson, Congreve, Kneller, etc., parmi les littérateurs et les artistes. C’était le cuisinier du club (Christophe Cat) qui lui avait donné son nom : le riche libraire Tonson en devint plus tard l’Amphitryon régulier à sa villa de Barlns-Elms. Ce club whigissime, comme Swift le surnomme, n’exerçait pas seulement sur la ville une influence politique : son ascendant domina la littéraire du temps ; bien plus, il décidait du rang des beautés à la mode, en faisant graver sur les verres de ses libations, le nom et l’éloge rimé de celles qui recevaient l’hommage du toast. Il y a six ans que la mémoire du club de Kit-Cat a été comme rajeunie par la publication d’un superbe ouvrage qui contient la biographie de ses principaux membres accompagnée de leurs portraits gravés avec tout le luxe de la calcographie anglaise.

L’importance des clubs dans le dix-huitième siècle nous est révélée par quelques-uns des plus ingénieux chapitres du Spectateur. Addisson y a tracé en quelque sorte le beau idéal de ces sociétés essentiellement anglaises. Le Club du Spectateur est un cadre dramatique dans lequel il a personnifié toutes les nuances du caractère national. On ne trouve que dans Fielding, Richardson et Walter Scott des portraits comparables à celui du bon sir Roger, type de ces Squires anglais dont le Wertern de Tom Jones est une variété si comique. Sir Andrew Freeport représente le marchand, le capitaine Sentry, le militaire, et Will Honeycombe le Beau ou Dandy de l’époque.