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à canon a changé en géométrie savante la lutte brutale des forces physiques, garanti à jamais les peuples civilisés de l’invasion des barbares, et rendu impossible à l’avenir l’établissement de la féodalité. L’imprimerie, en multipliant les témoignages connaissances humaines, a préparé la liberté d’examen. Tribune élevée au milieu de l’Europe, elle a convoqué toutes les nations à ses leçons, à ses jugemens et à ses fêtes. La pensée de l’homme s’est empreinte d’immortalité. L’ignorance à jamais bannie ; le passé, le présent et l’avenir, unis par une chaîne électrique ; les documens de la science conservés dans leur intégrité : ces bienfaits immenses émanent d’une découverte simple en elle-même, lentement élaborée pendant le moyen-âge, et née des pratiques de la superstition la plus crédule.

Telles sont les bases sur lesquelles s’est élevée la grandeur des sociétés modernes. C’est au fond du moyen-âge qu’il faut les chercher. Si nous avons dépassé les peuples anciens, ce n’est qu’en suivant le sillon tracé par nos pères. Leur scolastique a frayé la route à nos sciences morales ; leur astrologie à notre astronomie, leur alchimie à notre chimie. Que serions-nous si le Nouveau-Monde n’était pas découvert ; si l’imprimerie n’était pas inventée ; si l’esclavage n’était pas aboli ; si la guerre se faisait encore à coups de frondes et de flèches ; si les instrumens d’optique avaient manqué aux astronomes ? Ne flétrissons pas la mémoire des hommes qui ont préparé nos jouissances, notre gloire et notre orgueil. Ils manquaient de goût sans doute, et, jetés dans une époque sanglante, et confuse, ils n’ont pas égalé, dans les arts d’imagination, les peuples heureux qui les précédèrent. Cependant sous ce rapport ils ont leurs titres à faire valoir. Qui s’est promené sous les voûtes de la cathédrale de Cologne, sous les arceaux de Westminster à Londres, sans rester pénétré d’admiration pour le génie qui disposa ces masses et tailla ces forêts de pierre ? Jamais l’architecture ne sut frapper les hommes d’un sentiment plus profond de terreur sacrée. C’est l’élégance dans l’originalité, c’est le sublime dans tout ce qu’il a de plus ; grandiose et de mystérieux. Le monde réel, la vie positive s’effacent sous ces longs pilastres, sous ces voûtes immen-