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sur la côte de californie

sénateurs sudistes, lesquels voyaient s’augmenter ainsi le nombre des États anti-esclavagistes.

San-Francisco n’avait pas de trottoirs, mais possédait un grand nombre de criminels, repris de justice, échappés du bagne, qui multipliaient les mauvais coups. L’émigration avait amené deux catégories de citoyens : une élite d’hommes énergiques, intelligents et tenaces, et une élite d’hommes débauchés, paresseux et malhonnêtes. Les premiers se réunirent pour pendre les seconds. C’est ce qu’on a appelé le « Comité de Vigilance » de 1851. Il y en eut un second en 1866. L’un et l’autre furent absolument remarquables pour l’esprit pratique qui présida à leur organisation, la correction des enquêtes, la fermeté et la modération des jugements. Il y eut peu d’exécutions : elles suffirent à inspirer aux criminels une salutaire terreur.

Dans les mines, on jouait volontiers du couteau. Des campements étranges, sommairement établis dans un repli de montagne, réunissaient les Européens décavés et les Yankees avides. Des fortunes se faisaient et se défaisaient au jeu. La bête humaine se montrait dans toute sa sauvagerie, sans frein et sans loi.

Pauvre Californie ! Les véritables richesses de son sol privilégié demeuraient inconnues, attendant la fin du mauvais rêve et la venue du bon ouvrier.

iv


Ici se place un incident qui intéresse trop directement la France pour qu’on puisse le passer sous silence. La fièvre de l’or avait sévi, comme une véritable influenza, sur les deux rives de l’Atlantique, dans le vieux monde comme dans le nouveau. Les agences d’émigration de Bordeaux et de Paris n’étaient pas les moins actives et, vers 1851, il y avait tout près de 8.000 Français en Californie. Disséminés dans les cam-