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remettant sa veste. — C’est ce que j’ai bu… J’aurais dû m’en méfier.

— Non, ce n’est pas ce que vous avez bu, répliqua la voix. Calmez vos nerfs.

— Oh ! s’écria Marvel.

Et son visage devint blême, sous le hâle.

« C’est ce que j’ai bu », répétaient ses lèvres sans faire de bruit. Et il jetait des regards ébahis autour de lui. Et il reculait, à pas comptés.

— Je jurerais bien que j’ai entendu une voix, murmura-t-il.

— Certainement !

— La voilà encore ! fit M. Marvel en fermant les yeux et en passant la main sur son front, d’un geste tragique.

Il fut tout à coup saisi au collet, secoué violemment, et resta plus effaré que jamais.

— Ne faites pas la bête ! ajouta la voix.

— C’est bon, mon brave, on s’en va… Tout cela est inutile. Il n’y a pas de quoi discuter pour ces bottes éculées. Je m’en vais… Mais… c’est peut-être des esprits !

— Non. Écoutez.

— Hein, mon brave ?

— Une minute ! fit la voix vibrante d’énergie…

— Alors ?… demanda Marvel, qui venait d’avoir la sensation d’être touché à la poitrine par un doigt.

— Ainsi vous croyez que je suis un esprit, rien qu’un esprit ?

— Que seriez-vous, autrement ? dit Marvel en se grattant la nuque.

— Très bien ! fit la voix avec un ton de soulagement. Maintenant, je vais vous lancer des pierres jusqu’à ce que vous ayez changé d’avis.

— Où êtes-vous donc ?

La voix ne répondit pas, et une pierre, comme venue du ciel, passa en sifflant : il s’en fallut de l’épaisseur d’un cheveu qu’elle n’atteignît l’épaule de M. Thomas Marvel. Celui-ci, se retournant, vit un autre caillou suivre une trajectoire savante, demeurer suspendu un instant, puis tomber sur le sol d’un mouvement si rapide qu’il en était presque