— Vous avez des livres !… dit-il tout à coup en cessant la manœuvre du cure-dent.
M. Marvel tressaillit et le regarda.
— Oui, oui, fit-il… des livres.
— Il y a des choses extraordinaires dans les livres.
— Je crois bien !
— Mais il y a aussi des choses extraordinaires ailleurs que dans les livres.
— C’est encore vrai !
M. Marvel leva les yeux sur son interlocuteur et l’observa.
— Il y a, par exemple, des choses extraordinaires dans les journaux.
— Sans doute !
— Et même dans ce journal.
— Ah !
— Il y a une histoire, — dit le marin en fixant sur M. Marvel un œil assuré, — il y a, par exemple, une certaine histoire d’homme invisible…
M. Marvel eut une moue de dédain, se gratta la joue et sentit ses oreilles en feu.
— Qu’est-ce qu’ils vont raconter bientôt ! — soupira-t-il d’une voix molle. — En Autriche ou en Amérique, cet homme invisible ?
— Non, non… ici.
— Seigneur ! s’écria M. Marvel en se levant vivement.
— Quand je dis ici, — reprit le marin, au grand soulagement de Marvel, — je ne veux pas dire ici, dans l’endroit où nous sommes, je veux dire près d’ici.
— Un homme invisible ! Et qu’est-ce qu’il a pu faire ?…
— Toute espèce de choses ! — dit le marin, qui surveillait son voisin du coin de l’œil. — Oui, toute espèce de choses !
— Je n’ai pas vu le moindre journal depuis quatre jours.
— C’est d’Iping qu’il est parti.
— Vraiment !
— C’est là qu’il a commencé. D’où venait-il alors ? Personne ne paraît le savoir. Tenez, là : Une singulière histoire à Iping. Et il est dit, dans l’article, que les preuves sont extrêmement fortes, extrêmement.
— Bon Dieu !