Page:Revue de Paris - 1907 - tome 6.djvu/522

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui… Mais il plaisantait, bien entendu !… Il ne pourrait pas épouser une jeune fille qui ne fût pas tout à fait comme il faut… Oh ! ma chère, avez-vous jamais vu d’aussi belles perles ?

Elles s’étaient arrêtées devant la table où les bijoux de la mariée étaient exposés, et le cœur de Lily palpita d’envie à la vue de la lumière qui se réfractait à leur surface, la lueur laiteuse de perles parfaitement appariées, feu des rubis rehaussé par le velours sur lequel ils se détachaient, intenses rayons bleus des saphirs dont la clarté était avivée par les diamants qui les sertissaient : toutes ces nuances précieuses gagnaient en éclat et en profondeur par l’art infiniment varié des montures. L’ardeur des pierres réchauffait les veines de Lily comme un vin généreux. Plus complètement qu’aucune autre manifestation de la richesse, elles symbolisaient la vie vers laquelle elle aspirait le plus, la vie d’isolement dédaigneux et raffiné où chaque détail aurait le fini d’un joyau, et dont l’ensemble serait l’harmonieuse monture de sa beauté rare, merveilleux joyau elle-même.

— Oh ! Lily, regardez donc cette pendeloque en diamant… elle est grande comme une assiette ! Qui peut bien l’avoir donnée ? (Miss Farish pencha sa myopie sur la carte posée auprès de la pendeloque.) « Monsieur Simon Rosedale… » Quoi ! cet affreux bonhomme ? C’est vrai… je me rappelle, c’est un ami de Jack, et je suppose que ma cousine Grace a été forcée de l’inviter aujourd’hui ; mais cela doit lui être plutôt désagréable d’avoir à permettre que Gwen accepte un pareil présent de ce monsieur.

Lily sourit : elle avait des doutes sur la répugnance de Mrs. Van Osburgh, mais elle savait que c’était l’habitude de miss Farish d’attribuer ses propres délicatesses de sentiment aux personnes qui devaient en être le moins encombrées.

— Bah ! si Gwen ne se soucie pas qu’on le lui voie porter, elle pourra toujours le changer pour autre chose, — remarqua-t-elle.

— Ah ! voici quelque chose de bien plus joli ! — continua miss Farish. — Regardez, je vous en prie, ce ravissant saphir blanc… Je suis sûre que la personne qui l’a choisi a dû se donner beaucoup de mal. Qui est-ce ?… Percy Gryce ? Oh ! alors, cela ne m’étonne pas ! (Elle eut un sourire significatif en replaçant la