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de la Conférence des Avocats, déclarait qu’il n’était pas venu à l’idée de son « patron », depuis un an qu’il était chez lui, de lui donner une seule affaire. Compter sur l’appui des maîtres, amis de son père ? D’abord, toute sollicitation lui répugnait ; ensuite il était d’avis qu’il faut, sans être trop exigeant, se contenter de savoir que l’on a des sympathies sans espérer des protections : « Il faut compter beaucoup sur soi, et puis encore sur soi. »

Son ennui, son humeur noire lui revenait en des crises plus fréquentes ; il s’enfonçait alors dans la solitude : « Dans ces moments-là, le chemin où je m’engage m’apparaît comme un cul-de-sac. Est-ce la réalité ? est-ce l’hallucination ? Je ne sais. Mais toujours est-il que, si je me demande ce que je fais ici, il m’est parfaitement impossible de me répondre. Bienheureux les fils d’épiciers ! » Un autre jour, il écrit qu’il a sérieusement envie de postuler une place de juge de paix à Blain. L’incertain lui pèse. Enfin il prend un parti : il informe son père que, sans qu’il y ait dans ce désir ni un atome de légèreté, ni une ombre de paresse, il aspire à retourner près du foyer domestique…

Le sort en est jeté, il quitte Paris ; il sera avocat en province. Outre son père, le barreau de Nantes comptait son frère parmi ses membres. Il jugea inconvenant de s’y faire inscrire à leur côté : au printemps de l’année 1870, il s’installait à Saint-Nazaire et s’apprêtait à plaider [1].

henry leyret

  1. Il fut, sur sa demande, rayé de la liste des stagiaires du barreau de Paris, le 4 février 1870. Le bulletin, signé Jules Grévy, bâtonnier, constate qu’il a rempli les conditions de stagiaire pendant six mois.