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Il avait pris la main de Lily sous son bras, mais elle le retint par un dernier geste de protestation :

— Je ne peux pas… je ne peux pas… Pas cela… Vous ne connaissez pas Gwen : ne me demandez pas cela !

— Il faut que je vous le demande… il faut que vous m’obéissiez, — persista-t-il, bien que tout pénétré lui-même de sa crainte, à elle.

La voix de Lily faiblit encore :

— Et si elle refuse ?…

Mais il ne put que répliquer :

— Oh ! ayez confiance en moi, ayez confiance en moi !

Et, cédant à sa pression, elle se laissa ramener en silence jusqu’au coin de la place.

Dans la voiture, ils ne dirent plus rien durant le bref trajet de la place au portail illuminé de l’hôtel où habitait Stepney. Là, il la laissa dehors, dans l’obscurité de la capote relevée, tandis qu’il se faisait annoncer à Stepney, et qu’il marchait de long en large dans le hall fastueux, en attendant que ce dernier descendît…

Dix minutes plus tard, les deux hommes passaient ensemble devant les portiers galonnés d’or ; mais, au milieu du vestibule, Stepney s’arrêta, avec un dernier sursaut de répugnance :

— C’est bien compris, alors ? — stipula-t-il nerveusement, la main sur le bras de Selden. — Elle part demain matin par le premier train… et ma femme dort et ne doit pas être dérangée.

EDITH WHARTON
Traduit de l’anglais par charles du bos

(À suivre.)