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LA REVUE DE PARIS

d’autres dangers nous menaçaient de toutes parts ;... nous avions à nous mettre en garde contre des tentations locales sans cesse renouvelées, contre des suggestions de tout genre, par lesquelles des hommes insensés ou peu clairvoyants attaquaient directement les passions - des élèves- ; à voir la persévérance et la multiplicité des moyens extérieurs et, quand on le pouvait, intérieurs, employés, on eût dit que l’effervescence d’une poignée d’enfants devait décider du gain d’une cause depuis longtemps perdue. —- Quelle mesure, quelle prudence ne fallait-il pas pour arrêter l’entraînement d’une jeunesse orgueil leuse de l’importance qu’on lui donnait, du rôle qu’on l’appelait à. jouer, qu’il était difficile d’écarter toutes les séductions mises en usage pour échauffer de jeunes têtes auxquelles on faisait accroire que délire était raison, et qu’elles pouvaient traiter sans respect le vieux bon sens de leurs pères et de leurs maîtres... Aussi Carnot ptit-il déclarer en toute vérité, à la Chambre des représentants, le 13 juin 1815 :

« L’enthousiasme que les élèves font éclater dans les lycées est admirable ; les sentiments qui les animaient ont été, il est vrai, comprimés quelque temps, mais ils n’en ont acquis que plus d’énergie. » Et tout confirme l’affirmation du royaliste Fabry : « Il y a eu des fédérations dans presque tous les lycées, et l’ardeur des élèves pour servir dans les compagnies de canonniers n’a pas été du dévouement, mais de la frénésie. »

Ce bonapartisme des lycéens, violemment affirmé par deux fois en un an, a-t-il vraiment eu des suites durables, et faut-il donner quelque importance à des « chahuts » d’adolescents, qui par inclination naturelle ont de tout temps préféré les exercices physiques et les parades militaires à la claustration monacale, au silence, aux homélies dévotes ? Nous avons peine à comprendre ces hauts fonctionnaires de l’université, ces préfets, ces généraux, que le niveau des études, les questions pédagogiques laissent presque indifférents, mais qui s’enquièrent avec souci, minutieusement, des tendances politiques, du bon ou du mauvais esprit des rhétoriciens. Préoccupés surtout de fonder un régime stable (en 1814 la France en est à son septième changement de régime depuis 1789) ils sont tous, fonctionnaires de Louis XVIII et agents de Napoléon, pressés d’agir sur la génération nouvelle, sur la