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Page:Revue de droit public - 1897 - A4T7.djvu/442

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entreprises rivales s’entendent sur un point, savoir sur l’intérêt qu’elles ont à maintenir des tarifs de monopole, et qu’avant comme après leur prétendue concurrence, les consommateurs paient les transports non au prix de revient, mais au prix de bénéfice maximum. C’est ce qui a toujours lieu, en réalité, un peu plus tôt un peu plus tard. Dupuit ne se préoccupe pas de ce fait parce qu’il le trouve naturel et légitime ; mais nous, qui ne sommes point de cet avis, nous devions le signaler.

L’établissement et l’exploitation d’une voie ferrée, comme ceux d’une route ou d’un canal, échappent donc par nature à la concurrence. Mais il y a plus : si la route et le canal, considérés en eux-mêmes, constituent un monopole naturel, au moins la traction qui s’y opère rentre dans les conditions de la concurrence par la raison qu’un nombre indéfini de voitures et de bateliers peuvent rouler sur la route ou naviguer sur le canal. Le péage, si on le maintient, se paie à un monopoleur ; mais le frêt se paie à des entrepreneurs concurrents. Dans les chemins de fer, au contraire, la voie constitue un monopole naturel et la traction en constitue un autre essentiellement lié au premier par la raison que, comme nous l’avons dit, un nombre indéfini de compagnies d’exploitation ne peuvent faire circuler sur les rails leurs convois de voyageurs et de marchandises. Ici, le loyer de la voie et le loyer des véhicules et des moteurs, le péage et le frêt, tout se paie à un monopoleur. C’est donc, par tous ces motifs, une véritable aberration que d’invoquer la liberté de l’industrie en matière de chemins de fer ; et il est d’autant plus urgent d’y chercher le bon marché par l’application des règles propres au monopole qu’ils constituent, comme on va le voir par l’étude de la question des tarifs, le monopole le plus puissant et le plus redoutable.