Page:Revue de droit public - 1897 - A4T8.djvu/57

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Laissons pour un instant de côté le point de vue des transports d’intérêt public, et considérons les chemins de fer comme un des capitaux qui interviennent dans la production des services ou produits d’intérêt privé. Il en est de la valeur du revenu de ces capitaux comme de la valeur du revenu de certains autres capitaux agricoles ou industriels : elle dépend des lieux et des temps. De même que le dessèchement d’un marais qui ne serait pas rémunérateur dans un certain district, ou à une certaine époque, le deviendrait ailleurs, dans le voisinage d’une grande ville, ou plus tard, après un certain développement de la population et de la richesse, de même une ligne de chemin de fer qui ne ferait pas ses frais à la fois spéciaux et généraux, sur un certain point, à un certain moment, les ferait sur un point différent,entre deux centres industriels et commerçants, à un moment différent, à la suite d’un progrès économique plus ou moins marqué. Ainsi, un pays étant donné, il y a peut-être d’abord quatre ou cinq lignes de chemins de fer qui feraient tout juste leurs frais spéciaux et généraux ou dont l’exploitation aux prix de monopole serait une exploitation à prix de revient. Quelques années plus tard, ces mêmes lignes feraient plus que leurs frais. En effet, la courbe du débit ou de la consommation, courbe décroissante par rapport au prix et sur laquelle repose toute la théorie du monopole, n’est pas une courbe invariable. Et, ainsi, au fur et à mesure que la population et la richesse se développent, le prix de revient s’abaisse en raison de la répartition des frais généraux sur une plus grande quantité débitée ou consommée de services ou produits. Dès lors, les tarifs de voyageurs et de marchandises qui auront été, au début, tarifs de prix de revient deviendront tarifs de bénéfice. En même temps, d’ailleurs, que les premières lignes construites feront plus que leurs frais, d’autres lignes apparaîtront comme étant en état de faire les leurs. Dans ces conditions, il y aurait pour l’État deux manières très distinctes de procéder à l’exploitation de son monopole. Il pourrait considérer les lignes diverses comme indépendantes les unes des autres, n’en entreprendre la construction et l’exploitation que quand elles se présenteraient comme susceptibles de faire leurs frais, et réduire toujours les tarifs quand elles commerceraient et continueraient à donner des bénéfices. Ou bien, il