Page:Revue de l'Orient Chrétien, vol. 12, 1907.djvu/198

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ne se corrompit et que l’homme ne mourût. Ils lui dirent : Nous viendrons au matin et nous te guérirons. Le malade fit signe au serviteur de suivre les médecins et d’apprendre ce qu’ils voulaient faire. Ils lui dirent : Le pied de ton maître a noirci ; si on ne le coupe pas, il mourra ; nous viendrons au matin et nous ferons ce qui plaira à Dieu. Le serviteur s’en retourna en pleurant auprès de son maître et lui dit : Voilà ce qu’ils veulent (faire) de toi. Il en fut très affligé et, à cause de son chagrin, il ne se coucha pas ; une bougie était allumée. Vers le milieu de la nuit, il vit un homme passer la porte, venir à lui et dire : Pourquoi pleures-tu, pourquoi es-tu triste ? Il dit : Seigneur, comment pourrais-je ne pas pleurer et ne pas être triste, car j’ai une fracture et voilà ce que les médecins veulent me faire. L’homme apparu lui dit : Montre-moi ton pied. Il l’oignit et lui dit : Lève-toi maintenant et marche. Le malade répondit : C’est brisé, je ne puis pas. Et il lui dit : Appuie-toi sur moi. Il s’appuya sur lui et marcha en boitant. L’homme apparu lui dit : C’est à peine si tu boites, pose ton pied de nouveau. Il oignit de nouveau ses pieds et il lui dit : Lève-toi maintenant et marche. Il se leva et marcha plein de santé, et il lui dit : Repose-toi maintenant, puis il ajouta quelques paroles sur l’aumône dont le Seigneur a dit : Bienheureux les miséricordieux parce qu’ils trouveront miséricorde[1], et : Le jugement sera impitoyable pour celui qui n’a pas eu de pitié[2], etc. Et il lui dit : Adieu. L’officier lui dit : Tu te retires ? Il lui dit : Que te faut-il de plus, puisque te voilà guéri. L’officier lui dit : Au nom de Dieu qui t’a envoyé, dis-moi qui tu es. Il répondit : Regarde-moi ; tu reconnais sans aucun doute cette bande de linge ? Il lui dit : Oui Seigneur, c’est à moi. Celui-là lui dit : Je suis celui que tu as trouvé mort et gisant le long de la route et à qui tu as donné la chemise ; Dieu m’a envoyé pour te guérir ; rends-lui donc toujours grâces. Il sortit ensuite par où il était entré et celui qui venait d’être guéri loua Dieu cause de tout bien.

39. — Un autre officier royal[3] retournait de Palestine à Constantinople. Dans les environs de Tyr, il rencontra un aveugle qui se tenait le long de la route et n’avait personne pour le conduire. Celui-ci, entendant le bruit des palefreniers, s’écarta un peu le long de la route, étendit les mains, puis implora en demandant l’aumône. L’autre n’y fit pas attention et le dépassa, mais, à quelque distance de là, il s’en repentit, il arrêta son cheval, prit sa bourse, en tira une pièce[4], retourna en personne auprès du pauvre et la lui donna. Celui-ci la reçut et pria en disant : J’ai confiance en Dieu (et je crois) que cette bonne action te sauvera du péril. L’officier accueillit cette prière avec confiance, puis entra dans la ville et y trouva le gouverneur ainsi que des soldats[5] qui lui demandaient un

  1. Matth., v, 7.
  2. Cf. Matth., xviii, 35.
  3. Ms. 1596, p. 606 (ROC, 1903, p. 95). Coislin 232, fol. 167 ; Grec 1036, fol. 236.
  4. Tremissis (tiers d’as).
  5. Ou gladiateurs. Nous n’avons pas trouvé ce mot dans les dictionnaires. Cf. infra, n. 166.