Page:Revue de l'Orient Chrétien, vol. 13, 1908.djvu/295

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par la joie de son cœur et il admira la grâce puisque Dieu lui rendait ainsi témoignage. Et il dit : J’étais indigne même de la vie de ce monde, et tu as eu pitié de moi (comme l’indique) ce prodige grand et nouveau. Pendant qu’il continuait ainsi sa confession, le jour parut et il se réjouissait dans le Seigneur sans penser à prendre la nourriture corporelle. Il entretint le feu de cette lampe durant toute sa vie en y versant de l’huile et la tenant allumée au-dessus pour qu’elle ne s’éteignît pas. Ainsi l’Esprit-Saint habita de nouveau en lui et il devint illustre au milieu des autres, plein d’humilité et d’allégresse dans sa confession et son action de grâce au Seigneur. Lorsqu’il fut sur le point de mourir, il en eut la révélation quelques jours avant.

176. — Un vieillard demeurait dans le grand désert[1], or il avait une parente et, après beaucoup d’années, elle voulut le revoir. Elle chercha où il habitait et se mit en route pour ce désert, elle trouva une caravane de chameaux et entra dans le désert avec eux. Or elle était poussée par le diable. Quand elle arriva à la porte du vieillard, elle se fit reconnaître et lui dit : Je suis ta parente ; et elle demeura près de lui. Le vieillard, tenté, pécha avec elle. Or il y avait un autre anachorète qui demeurait à la partie inférieure du désert ; il remplit un vase d’eau et, à l’heure de manger, (cette eau) se répandit. Par un effet de la providence, il se dit : J’irai au désert raconter cela au vieillard. Il se leva et partit. Le soir venu, il dormit dans un temple de démons le long de la route. Durant la nuit il entendit les démons dire : Nous avons fait tomber l’anachorète dans l’impureté. Ces paroles l’attristèrent ; il alla près du vieillard, le trouva chagrin et lui dit : Que ferai-je, abbé, parce que je remplis un vase d’eau et au moment de manger elle se répand ? — Le vieillard répondit : Tu viens me dire : Que ferai-je parce que mon vase se vide ? mais que ferai-je moi-même qui suis tombé cette nuit dans l’impureté ! L’autre dit : Je le savais. Et (le vieillard) lui dit : Comment le sais-tu ? Il répondit : J’étais couché dans le temple et j’entendais les démons qui parlaient de toi. Le vieillard dit : Je vais m’en aller aussi dans le monde. Mais l’autre le suppliait et disait : Non, père, mais demeure à ta place et renvoie la femme d’ici, car c’est là une embûche de l’ennemi. Il l’écouta, et continua son genre de vie en versant des larmes jusqu’à ce qu’il fût revenu à son rang premier.

177. — Un frère demanda à un vieillard : Si quelqu’un tombe en tentation relativement à quelque vertu, qu’arrive-t-il au sujet de ceux qui sont scandalisés[2] ? — Et le vieillard lui dit : Il y avait un diacre célèbre dans un couvent d’Égypte. Un magistrat[3] poursuivi par le gouverneur vint avec toute sa maison dans le monastère. Par l’action du malin, le diacre pécha avec la femme et tous furent dans la honte. Le diacre alla près d’un vieillard qu’il aimait et lui raconta la chose. Or le vieillard

  1. M, 746, n° 14 et 879, n° 24 ; Coislin 127, fol. 91 ; B, p. 743, n° 119.
  2. M, 880 ; Paul, 15 ; Coislin 127, fol. 91. Cf. ROC., 1906, p. 198-199 ; B, p. 300.
  3. Le syriaque a transcrit le mot grec et un scribe a ajouté en marge « Vizir ».