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124 LA REVUE DE L'ART Ce Bernardo Bellotto, Vénitien d'origine, était le neveu et le disciple du fameux Antonio Canale, dit le Ganaletto. Son genre est aussi de prendre des vues, dit Mariette. II. cherche à être en tout un parfait imitateur de son maître; le roi de Pologne, électeur de Saxe, n'ayant pu avoir l'oncle, a fait venir à Dresde le.neveu, et lui a l'ait peindre les principales vues de la ville de Dresde, et il les lui a ensuite l'ait graver. Cela s'est fait en 1752: on les croirait gravées par Ant. Canal même, tant elles sont ressemblantes par la touche à ce qui a été gravé à Venise par ce dernier. C'est la même fermeté de pointe; on y trouve de même à redire trop d'égalité dans la touche et des dégradations de lumière pas assez sensibles. Du reste, ces vues sont fidèles; elles sont très bien en perspective; si les tableaux sont aussi bien peints, le Canaletto est un digne élève de son maître. A l'époque où Mariette écrivait sur lui ce jugement si succinct et si juste, le Canaletto — car Bellotto avait hérité du surnom de son oncle, en même temps que de sa manière, — le Canaletto se trouvait à Dresde, depuis un temps qui devait déjà sembler long à un voyageur comme lui. De fait, depuis le jour où il avait quitté Venise, il n'avait pas encore fait semblable halte. Né, comme nous l'avons dit, à Venise, en 1720, il avait commencé son tour d'Europe par l'Italie, et Rome, Vérone, Pavic, Milan, l'avaient succes- sivement retenu ; de là, il était parti pour l'Angleterre, où son oncle avait fait, lui aussi, deux voyages : Horace Walpole le fit travailler, et l'on sait qu'il exécuta pour lui une remarquable vue de l'intérieur de King's Collège Chapel. Mais il ne paraît pas avoir longtemps séjourné à Londres, et dès 1745 il était à Dresde, au service du roi Auguste III, qui continuait à faire de la cour de Saxe la première cour d'Europe, après celle de Prance, pour le luxe et le goût des choses de l'art. Le comte de Bruhl, l'adroit courtisan et le mauvais ministre qui avait su se rendre indispensable et qui gouvernait en maître, trouva Bellotto à son goût et lui commanda vingt et une toiles représentantles principaux aspects de la « Florence saxonne ». L'artiste, qui ne devait jamais être payé de son travail autrement que par sa nomination de peintre de la cour de Saxe, s'était mis à l'oeuvre en 1747, à raison de vingt écus par mois (1751), et il travaillait encore à ces compositions en 1756, quand la petite armée saxonne, s'étant laissée envelopper au camp de Pirna — une ville que Bellotto avait souvent représentée aussi, — sa capitulation amena Frédéric le Grand sous les