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de 0m122 sur 0m06, sur lequel est figurée la guérison de l’aveugle (fig. 9). Le Christ imberbe, les costumes encore antiques, amènent à assigner à ce morceau une date assez reculée ; c’est une scène semblable à celles qui ornent les sarcophages chrétiens des VIe et VIIe siècles.

Je passe sous silence les reliques (saint sang, restes de martyrs, pierres de Terre-Sainte) et leurs authentiques (du VIIe au XIIe siècle), dont plusieurs offrent un réel intérêt historique, pour signaler à l’attention des spécialistes des fragments assez nombreux de tissus, deux tuniques complètes, des morceaux de soie admirablement conservés, dont l’un rappelle, par l’ornementation, le célèbre tissu Ito du temple Horiushi, à Nara (Japon), publié par Strzygowski, et les autres (lions stylisés et affrontés, coqs richement ornés, scènes de l’Annonciation et de la Nativité, chasses au lion avec chiens et palmier au fond, Androclès terrassant un lion, dans des encadrements de cercles de feuillages, de cœurs, de gros pois et de fleurons), ont leurs analogues dans les étoffes des musées de Berlin, de Lyon ou de Bruxelles, publiées par MM. Julius von Lessing et Cox. Les motifs sont tissés, les fonds sont jaunes, rouges ou roussâtres, les dessins en noir violacé, les ornements d’une assez grande richesse de tons. Ces tissus de soie appartiennent, pour la plupart — ceux du moins dont les ornements et scènes sont nettement d’origine orientale — à cette variété que M. Julius von Lessing appelle sassanide ou persane ; ils remontent aux VIIe, VIIIe et IXe siècles. La scène de l’Annonciation elle-même, que nous reproduisons ici (fig. 10), est byzantine. Les inscriptions grecques de plusieurs nous révèlent leur origine, identique à celle des tissus du trésor de la cathédrale de Sens, retrouvés par MM. l’abbé Chartraire et Maurice Prou.

On voit, par ce trop rapide aperçu, que le contenu du coffre de Léon III valait la peine d’être examiné avec soin, et ceux qui ont pu trouver indiscrète l’insistance que nous avons mise pour sa divulgation nous pardonneront peut-être en lisant ces lignes. À défaut des Tables de la Loi que conservait le Saint des Saints de Jérusalem, le Saint des Saints de Rome renferme des objets d’une importance considérable, et même nous y avons trouvé, parmi les reliques, de la « manne » et la « verge d’Aaron », comme dans l’ « Arche d’alliance » du Temple de Salomon.

Ph. LAUER