Page:Revue de l'art ancien et moderne, juillet 1906.djvu/357

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294 LA REVUE DE L'ART avait signalé, sur un tableau de l'Institution du Rosaire, une signature qu'il n'avait lue qu'imparfaitement. Quelle fut notre surprise, en l'exami- nant de près, d'y découvrir le nom de Bobrun et la date de 1631 ! Nous étions en présence d'une oeuvre des deux célèbres peintres, Henri et Charles Beaubrun, dont on n'avait pu, jusqu'à ce jour, retrouver une seule toile signée 1. Celle-ci, malheureusement, n'est, qu'une pieuse allégorie, où les futurs peintres des élégances de la cour n'ont pu donner libre carrière a leurs pinceaux. Saint Dominique et sainte Catherine de Sienne, en costumes monastiques, et dans des poses convenues, n'offrent rien de séduisant; mais la Vierge et l'Enfant sont d'une grâce charmante et d'un mouvement vraiment heureux. Ce tableau valait pour nous un document écrit. Il avait été fait pour Louis Gouffier, comme le prouvaient ses armes, et spécialement pour la collégiale, qui possédait une chapelle du Rosaire, où le duc avait droit de sépulture. Les Beaubrun travaillaient donc pour l'église d'Oiron en 1631. Pourquoi leurs pinceaux ne se seraient-ils pas employés également au château? Le consciencieux Jal n'avait pu trouver traces des deux frères à Paris avant cette année 1631. Tout s'expliquerait, si le duc les avait retenus en province à des décorations, qui ont certainement dû demander plu- sieurs années. Nous-ne connaissons malheureusement pas dans leur entier les tra- vaux de Louis Gouffier à Oiron. Ils ont disparu, comme presque tous ceux de son aïeul, dans le bouleversementgénéral du château, au milieu du règne de Louis XIV, quand, en 1669, le duc de Roannez céda le domaine au duc de La Feuillade. Le fastueux maréchal, qui élevait à ses frais une statue au Ptoi-Soleil sur la place des Victoires, rêva de faire d'Oiron une demeure somptueuse et magnifique, sur le modèle des résidences royales. Il porta la pioche dans l'oeuvre élégante du xvic siècle. Tout le bâtiment central reçut le cachet imposant, mais lourd, à la mode du jour. Les grands appar- tements furent diminués de hauteur ; l'architecte descendit les plafonds sans les refaire, comme pour le salon du roi, ou en leur substituant, comme 1. Les tableaux de Tours, Vénus et Minerve, provenant de Chanteloup et qu'un inventaire de la Révolution attribue à «Bobrun d'Amboise », semblent plus modernes. Quant à Mme Hardy, fille de M. de Nointel, du musée de Versailles, la note manuscrite, collée au dos, qui la donne à Beaubrun en 1633, est d'une écriture postérieure, et le tableau tellement repeint qu'il ne conserve rien de l'oeuvre originale.