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LA REVUE DE L'ART 364 trouvâmes tous les deux tout là-haut, là-haut, Clairin, je le connaissais : Renouard, je le rencontrais pour la première fois, et voici le souvenir que j'ai gardé du Renouard de ce temps-là: au-dessus d'une barbe noire, noire... et toute hérissée, toute ébouriffée, deux petits yeux fureteurs, aigus, péné- trants; au-dessus de ces yeux, une extraordinaire forêt de cheveux plus noirs et plus hérissés que la barbe et que la moustache. Ce petit homme chevelu et barbu était en train de s'escrimer contre un tigre, lequel tigre se roulait voluptueusement par terre, visiblement charmé d'entendre les choses exquises qu'un colossal Apollon tirait d'un gigantesque violoncelle. »— Il est très bien, votre tigre, dit Garnier à Renouard. »— Ah ! vous êtes content ! — Et les petits yeux du petit homme noir pétillèrent de plaisir. » Le jour baissait, Clairin- et Renouard firent leurs préparatifs de départ. Nous redescendîmes tous les quatre, R.enouard avait sous le bras un immense carton-vert. Que de fois, depuis ce jour-là je l'ai revu, à l'Opéra, ce grand carton vert de Renouard, car Renouard était entré à l'Opéra pour n'en plus jamais sortir. Il ne demanda pour cela aucune autorisation ; il était dans la place, il y resta. » Il y resta jusqu'au moment où il prit sa valise pour aller explorer le vaste monde. C'était très irrégulier, mais quoi ? On était habitué à le voir ;

quand l'escalier fut fini, personne ne songea à lui demander de quel droit,

en vertu de quel papier administratif, il se pro- menait comme chez lui dans le dédale des cor- ridors, des coins et des recoins, des caves, des greniers et des coulisses de cet immensebâtiment qui abrite un monde. Il finit même par découvrir sous les com- bles une petite pièce inoccupée, sur la porte de laquelle la clé se trou-