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404 LA REVUE DE L'ART Mais quoi, il fallait bien étudier les Pandectes ! M. Hébert père n'était pas encore décidé à céder son étude, n° 12, Grande-Rue, à Grenoble, où le futur.auteur de la Malaria pouvait, si la destinée l'eût voulu, passer sa vie. Ernest Hébert était pris entre les pinceaux et les panonceaux. Enfin, il fut reçu avocat le 1er juin 1839. Il pouvait songer désormais moins à ses livres qu'à sa palette. Le mois d'août approchait où les concours allaient s'ouvrir pour le prix de Rome. Loyalement, David d'Angers dit à son élève : «  Vous pouvez con- courir dès à présent. Mais auprès de mes collègues de l'Institut, je suis mal vu, à cause de mes opinions peut-être, et mes élèves pâtissent et payent souvent pour moi. Allez donc chez Delaroche. Il est très aimé de ses con- frères, il est très chaud pour ses élèves. Il a l'oreille de l'Académie. Il sera plus utile pour votre avenir que moi ». Et Hébert suivit le conseil du maître statuaire. Il entra chez «M. Delaroche ». Troisième bonne fortune qui décida de toute sa vie. Avec Paul Delaroche il étudia et, quinze jours avant d'être reçu avo- cat, il avait été admis le premier des suppléants à l'École des beaux-arts. Il y a trois épreuves pour le concours du prix de Rome. A la première épreuve, Hébert était reçu le huitième sur cent vingt ; à la deuxième, la figure' nue, où sur vingt élèves on en reçoit dix, il entrait en loge le dixième, c'est-à -dire le dernier, après Thomas Couture de l'atelier Gros, et Isidore Pils. Mais l'esquisse de son tableau, la Coupe de Joseph retrouvée dans le sac de Benjamin (un des meilleurs morceaux qui figurent à l'École parmi les prix de Rome), avait bénéficié de l'enseignement de David. Hébert avait exécuté son esquisse en bas-relief, et sa peinture, d'après la ronde bosse, prenait ainsi une saisissante réalité. Le jour du salopin, — lorsque tous les tableaux sont finis, après un mois et demi de travail, — tous les concur- rents se visitent entre eux et les élèves chevronnés de M. Delaroche, les «  malins » de l'atelier, Couture, Briout, regardaient, étonnés, le tableau du «dernier». Paul Delaroche, qui travaillait alors à son Hémicycle, vint exa- miner, à son tour, les compositions de ses élèves. Il les tutoyait tous. Il y en avait qui travaillaient chez lui depuis trois ans, depuis quatre ans. Hébert n'était là que depuis quelques mois. Le maître passa devant les toiles : «  Ah ! j'attendais mieux de toi ! disait-il à l'un. — Ce n'est pas mal,