Ariste. — Vous avez raison.
Eudoxe. — N’avons-nous pas ainsi découvert quel est le vêtement nécessaire de la multiplicité connue par la pensée dans l’expérience ?
Ariste. — Nous l’avons découvert.
Eudoxe. — Et cette nécessité de l’espace comme forme de l’expérience n’est-elle pas le principe de la géométrie universelle ?
Ariste. — Comment cela ?
Eudoxe. — N’est-ce pas par la nécessité de ce principe que le géomètre, lorsqu’il étudie les propriétés nécessaires des figures dans l’espace, est certain d’étudier la nature même ?
Ariste. — Comment en serait-il certain autrement ?
Eudoxe. — Mais nous n’avons rien dit du changement ?
Ariste. — Non.
Eudoxe. — Et de ce que sera vêtement du changement ?
Ariste. — Je suis curieux de le savoir.
Eudoxe. — Comment donc la pensée connaîtra-t-elle qu’une chose change en restant la même ?
Ariste. — Je ne vois pas comment cela serait possible ?
Eudoxe. — L’union du changeant et de l’immuable n’est-elle pas connue sous la forme du mouvement ?
Ariste. — Comment cela ?
Eudoxe. — Se mouvoir n’est-ce donc pas changer en restant le même ?
Ariste. — Cela est vrai.
Eudoxe. — Ainsi le mouvement est la forme intelligible du changement, comme l’espace est la forme intelligible de la multiplicité ?
Ariste. — Il faut l’accorder.
Eudoxe. — Ainsi la pensée sera conduite nécessairement à connaître tout changement comme un mouvement ?
Ariste. — Elle ne peut y échapper.
Eudoxe. — Et cette nécessité du mouvement comme forme de l’expérience n’est-elle pas le principe de la mécanique universelle ?
Ariste. — Comment cela ?
Eudoxe. — N’est-ce pas par la nécessité de ce principe que le mathématicien, lorsqu’il étudie les propriétés nécessaires du mouvement dans l’espace, est certain d’étudier la nature même ?
Ariste. — Vous avez raison. Mais je vous avoue que je vous suis avec peine dans la démonstration de ces principes, si nouveaux pour moi.