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I

REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE. 

le propos, en faire saillir l’absurde et l’inhumain. Il y a jeu sur les mots, et, en somme, calembour. Remarquez qu’au fond le comique est absent ou à peu près. Ce qui nous plait ici, c’est cette espèce de brièveté avec laquelle on retorque, on renvoie au partenaire ses propres expressions.

Très fréquent est dans le théâtre moderne l’esprit obtenu par le jeu sur les mots. Il faut reconnaître qu’en général le jeu sur les mots est lui-même fait pour procurer une antithèse, une opposition cassante entre une demande et une réponse. Et ceci n’est plus jeu de mots, mais tournoi d’idées, de sentiments ; et le spectacle de ce conflit nous est ordinairement assez agréable pour provoquer au moins notre sourire. Mais voyez donc comme nous nous éloignons peu à peu du comique. Allons encore un peu plus avant dans cette direction.

La brièveté, la précision, la concision, portées à un certain degré, produisent un effet de surprise agréable, pour l’auditeur doué de quelque dilettantisme littéraire. L’étonnement, dès qu’il est un peu agréable, engendre le sourire. Or ce qui, en nous, engendre le sourire, passe pour être de l’esprit, à cause de la fréquence avec laquelle l’esprit produit en effet le rire et le sourire. Et voici, par convention, de l’esprit qui n’est presque plus qu’habileté de style, adresse littéraire, production tout à fait exempte de comique, même d’humeur gaie.

En sens inverse, au-dessous du jeu sur le mot, où l’on tire parti de ses acceptions diverses, plus légèrement encore, et très gaiement, on joue sur l’assonance de ce mot avec un autre, et on obtient des plaisanteries comme celles-ci « Où cours-je ? » « Avec quel as perds-je ? » L’image offerte d’objets bas ou ridicules, sinon par eux-mêmes, au moins à la place où on les amène, l’imprévu de leur apparition, produisent l’effet drôle.

Me voici arrivé à un genre d’esprit que pour mon compte je mets tout à fait à part des précédents.

• Rien de plus commun chez les poètes que l’emploi de l’analogie cela consiste à rapprocher deux choses très différentes par une ressemblance tout à fait extérieure, superficielle ou partielle. L’analogie est le principe commun de toutes les comparaisons, allégories, symboles et métaphores qui abondent dans la poésie. Trouver des ressemblances comme celle-ci « Le navire, errante charrue ; le marin, rude laboureur », ou suivre point par point une comparaison