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pensée comme à toutes les autres apparences, et les enfermant toutes, depuis la « splendeur de la nature extérieure » jusqu’à la pensée religieuse (1920, p. 367-370).

Dans une série d’articles intitulée Sense-Knowledge (octobre et juillet 1919, août 1920), M. James Ward s’efforce de faire voir qu’il n’y a pas, entre les sensations et les jugements, cette rupture que la philosophie de Locke comme celle de Descartes, celle de Kant comme celle de Hume, ont cru voir. L’expérience primitive elle-même, dans son unité indissoluble et sa continuité, est déjà une connaissance, contient des formes, des catégories. Sans doute il est difficile de les faire apercevoir, car il faut éviter de mêler à l’étude de cette connaissance sensible primitive des notions qui se sont formées postérieurement. M. Ward étudie, de ce point de vue, les premières formes de jugement (propositions existentielles, propositions impersonnelles). Il développe ses idées sur l’extensité naturelle des sensations, sur le rôle des signes locaux, sur les signes temporels. Il esquisse une théorie de l’origine perceptuelle des nombres.

M. Watt (1920, p. 257-276) s’attache à montrer que nos sensations n’ont pas seulement pour attributs la qualité, l’intensité, et comme on l’admet assez souvent maintenant l’extensité, mais encore l’ordre, un ordre qui n’est pas construit, mais donné dans la sensation même. C’est à partir de cet élément d’ordre que l’on construit l’idée de l’espace : mais cet élément est différent de l’espace et se trouve aussi bien dans les sensations auditives que dans les sensations visuelles. L’intelligence, la connaissance ont leur fondement dans les sensations et dans leur caractère d’ordre. L’intelligence rend les sensations plus cohérentes, mais elle est née de la cohérence même des sensations. Le mystère de l’esprit réside moins dans les formes de l’intelligence que dans la richesse, l’ordre et le mouvement des qualités sensibles.

Ainsi chez tous ces philosophes, réalistes critiques, idéalistes personnels ou idéalistes monistes, disciples de Leibniz ou disciples de Hegel, psychologues ou métaphysiciens, nous trouvons certaines directions de pensée semblables : sentiments de l’importance de l’idée d’extériorité, union profonde du spirituel et du corporel.

Mentionnons dans le domaine de la critique des sciences l’article de Broad sur l’induction (1920, p. 11-45) (pour comprendre l’induction, il faut, dit-il, admettre l’existence d’espèces naturelles et l’existence de certaines quantités permanentes) et surtout la note de F. H. A. Marshall, qui discute d’une façon précise les idées des philosophes et biologistes anglais de l’école vitaliste (1920, p. 63-76). Consultez sur la même question les quelques pages de D’Arcy Wentworth Thompson, sur un ouvrage du Dr Haldane, 1919, p. 359-362). — Dans le domaine de la philosophie politique, mentionnons l’étude faite par A. E. Taylor des idées de L. T. Hobhouse (1920, p. 91-105), de celles de Sidgwick (ibid., p. 108), celles de C. C. J. Webb sur l’ouvrage de Hetherington et Muirhead (1920, p. 110-111), et les précisions apportées par M. Bosanquet (1920, p. 77-81) sur sa théorie de la volonté générale, supérieure à toutes les volontés particulières et, malgré les apparences, impliquée dans toutes les volontés particulières.

Il faut signaler enfin l’article de Radhakrishnan sur « Bergson et l’idéalisme absolu » (1919, p. 275), la controverse entre M. Harward et M. W. Carr sur l’idée de perception pure dans la philosophie de M. Bergson (1919, p. 463-470) et la note intéressante de F. C. S. Schiller sur l’énergie spirituelle (1920, p. 350).





Saint-Germain-lès-Corbeil. — Imp. Willaume.