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Page:Revue de métaphysique et de morale, numéro 2, 1911.djvu/1

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LA NOTION MODERNE DE L’INTUITION
ET LA PHILOSOPHIE DES MATHÉMATIQUES

L’attention que la Revue de Métaphysique et de Morale a donnée aux problèmes de philosophie mathématique, a rendu familière pour ses lecteurs la distinction des trois thèmes qui depuis vingt ans se sont succédé dans les dissertations sur les problèmes généraux de la mathématique : thème du nombre entier, thème de la classe logique, thème de l’intuition.

Aux deux premiers thèmes correspondent des systèmes véritables, non de philosophie scientifique seulement, mais aussi de métaphysique. En même temps que se poursuivait le mouvement vers l’ « arithmétisation de l’analyse », Renouvier posait la loi du nombre qui, par action ou par réaction, a exercé une influence décisive sur la spéculation française de la fin du XIXe siècle. Corrélativement au double développement qu’ont accompli l’algèbre de la logique et la théorie des ensembles, M. Frege et, dans, une période d’ailleurs fort courte de sa carrière, M. Russell présentaient une métaphysique qui, par delà ce que The principles of Mathematics considéraient comme totally irrelevant notion of mind, restaurait l’ontologisme grammatical d’Aristote. De telles doctrines se prêtent facilement à un examen objectif. De fait elles ont reproduit d’elles-mêmes leurs conséquences historiques : le retour de Renouvier au dogmatisme de l’arithmétique pythagoricienne a rendu l’actualité aux paradoxes de Zénon d’Élée, dont Grégoire de Saint- Vincent et Leibniz avaient montré que la sommation des séries infinies résout techniquement toute la difficulté. M. Russell, en appuyant la mathématique au dogmatisme de la logique antique, a réveillé, d’un sommeil qu’on pouvait croire éternel, Épiménide le Crétois, et lui a fait débiter à nouveau le sorite du menteur.

L’intuition au contraire, et par sa nature même, ne nous offre pas

Hbv. Meta. –T. XIX (n« 2-1911).. 10